La délivrance est arrivée il y a quelques semaines. A 33 ans, Tony Estanguet pourra bel et bien rêver d’un troisième titre olympique (Sydney en 2000 et Athènes en 2004) grâce à sa qualification acquise dans la douleur, le 6 avril dernier à Pau. « J’ai quelques cheveux blancs qui ont poussé, je reviens de loin », avoue le champion français.
Aimé de la plupart des sportifs français, Tony Estanguet a reçu les encouragements de Marie-José Perec qui l'invite à la rejoindre dans le cercle très fermé des triples médaillés olympiques en compagnie de Félicia Balanger, l’ancienne gloire du cyclisme sur piste. « Nous sommes deux filles, ce serait bien qu'un garçon nous rejoigne», a lancé la Guadeloupéenne lors d'une soirée consacrée aux athlètes qui iront aux JO.
«Londres sera du bonus pour moi»
Pour Tony Estanguet, douze ans après sa première médaille d’or olympique, la tâche risque d'être difficile. Il ne s'en cache pas : « L’écueil pour moi, c’est d’avoir laissé trop de jus dans les sélections et aujourd’hui, j’ai besoin de rapidement oublier cet épisode et de me replonger sur l’objectif de Londres ». Mais le céiste n'a pas l'intention de revivre l'échec de Pékin.
Pour cela, il s’est rendu dès la semaine dernière sur le site de Londres afin de s’approprier les lieux. Dans l'immédiat, il n’est pas question de pression. « Londres sera du bonus pour moi car je n’ai pas l’impression d’avoir encore grand-chose à prouver. J’ai envie d’aller à Londres pour savourer, pour profiter. Cela ne veut pas dire que je vais y aller la fleur au fusil car l’idée est de finir sur une bonne note », assure l’ancien porte-drapeau des JO de Pékin.
Candidat à la commission des athlètes du CIO
Mais un autre défi attend Tony Estanguet : l’élection à la commission des athlètes du Comité international olympique qui aura lieu pendant la compétition. Une candidature officialisée le 15 mars dernier par Denis Masseglia, président du Comité national olympique et sportif français. Avant lui : le judoka David Douillet, la joueuse de tennis Amélie Mauresmo et le skieur Antoine Dénériaz s'y étaient cassé les dents. Seuls quatre athlètes ayant participé aux JO de Pékin ou encore en activité lors de ceux de Londres seront élus. Autant dire que le quota est très léger.
« Les statistiques donnent froid dans le dos, cela s’annonce compliqué d’être élu, mais j’ y crois parce que le contact et les relations que j’ai avec les différents athlètes sont positifs. J’ai l’impression que beaucoup de gens ont envie de m’aider pour que cela aboutisse. Moi je veux rester naturel, c'est-à-dire un athlète en activité qui veut défendre les autres athlètes », analyse Tony Estanguet.
Quels sont les atouts de Tony Estanguet ? Pour défendre sa candidature le sportif s'appuie entre autres, sur son parcours : « J’ai eu pendant ma carrière à mener un double projet et je sais que pour la plupart des athlètes qui participent aux jeux, il n’est pas question de sport professionnel. Il faut gérer d’autres aspects et j’ai envie de porter cette voix-là au CIO et d’être dans la polyvalence et la complémentarité entre les différentes disciplines car je crois beaucoup à cela ».
Une façon d’oublier aussi le peu d’intérêt porté au sport lors de la campagne présidentielle française de 2012. « Je suis déçu que la thématique du sport ait été un peu négligée dans cette élection. Je trouve cela dommage et je suis convaincu que développer le sport et la pratique pour tous permettrait de retrouver des valeurs assez saines dans nos sociétés », a estimé le futur candidat au CIO.
Contrairement aux politiques, Tony Estanguet a déjà bien affûté ses arguments pour défendre le sport avant de partir à la chasse aux voix. Des voix qui lui permettraient d’atteindre son principal objectif : que l’on prenne en considération les préoccupations de la majorité des athlètes, souvent dans l’ombre entre deux olympiades.
Tous propos recueillis par Farid Achache