Discussion sur la Syrie à Munich: des acteurs aux intérêts contradictoires

Parmi les nombreuses crises dans le monde, dont l’édition 2018 de la conférence sur la sécurité de Munich s'est faite l'écho, figurait la Syrie. Une discussion ce dimanche 18 février a montré que les différents acteurs, même s'ils sont alliés sur le papier, poursuivent des objectifs bien différents, voire opposés.

Avec notre envoyé spécial à Munich, Pascal Thibaut

Une situation sécuritaire moins critique mais un risque de balkanisation et une issue politique toujours incertaine. C'est ainsi qu'on pourrait résumer les échanges sur la Syrie à Munich, dimanche 18 février.

Le danger islamiste constitué par Daech est considéré comme résolu ou presque. En revanche, l'implication des différentes puissances étrangères ne facilite pas une sortie de crise a regretté « très inquiet » l'envoyé spécial de l'ONU sur le dossier, Staffan de Mistura.

Craintes d'une explosion du pays

L'intervention turque dans le nord de la Syrie a également été critiquée. Le secrétaire général de la Ligue arabe a notamment demandé à Ankara de respecter les principes internationaux. Le ministre des Affaires étrangères turc a justifié les opérations de son pays et critiqué le soutien des Etats-Unis aux forces kurdes.

La discussion de Munich a mis en exergue les intérêts contradictoires des différents acteurs étrangers qui attaquent plus ou moins diplomatiquement les agissements d'autres puissances parfois alliées.

Ces interventions exterieures risquent de remettre en cause l'unité de la Syrie, craint Staffan de Mistura. Quant à une issue politique, elle reste plus que jamais incertaine. Ainsi, un parlementaire russe – dont le pays soutient le régime en place – estime que le président Assad est incontournable car seul légitime. Or, les représentants de l'opposition syrienne présents à la conférence sur la sécurité font de son départ un préalable à toute solution.


Sur le terrain: Importants renforts des troupes d’élites syriennes dans la Ghouta orientale

Dans le même temps, sur place, l’armée syrienne a dépêché d’importants renforts dans la Ghouta orientale, l’une des quatre zones de désescalade, à l’est de Damas, rapporte notre correspondant à Beyrouth, Paul Khalifeh. Des sources du régime et de l’opposition s’attendent à une vaste offensive des troupes gouvernementales en cas d’échec des négociations en cours.

Un calme total a régné sur tous les fronts de la Ghouta orientale, ce week-end, après des semaines de combats qui ont fait des centaines de morts et de blessés civils, et vu la chute de dizaines d’obus et de roquettes sur la capitale. Ce cessez-le-feu non déclaré accompagne d’intenses négociations menées entre des représentants des rebelles et des autorités, sous l’égide de la Russie.

Ces pourparlers visent à ramener le calme dans cette région, inclus dans les quatre zones de désescalade, convenues à la conférence d’Astana, avec la garantie de la Turquie et de l’Iran. Mais le gouvernement syrien exige des rebelles qu’ils chassent les groupes jihadistes de cette vaste zone assiégée, où vivent encore quelque 400 000 personnes. En contrepartie, il promet un allègement du blocus et l’acheminement de vivres et de médicaments.

Grands mouvements de troupes

Les négociations se déroulent dans un climat de fortes pressions exercées sur les rebelles. Le régime a dépêché dans la Ghouta d’importants renforts des troupes d’élites, conduites par le célèbre général Souhail al-Hassan, artisan des principales victoires remportées par l’armée syriennes ces deux dernières années. Des convois militaires comportant des dizaines de chars et de canons ont été vus se dirigeants vers l’est de Damas.

De plus, le commandement militaire russe en Syrie a annoncé qu’il soutiendrait toute opération terrestre des troupes gouvernementales en cas d’échec des négociations.

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