De notre correspondant à Beyrouth,
Les hauts responsables d'organisations internationales ou d'institutions financières ont multiplié les avertissements, ces derniers temps, à destination du Liban. Ils appellent à un déblocage de la situation politique, afin que le Liban puisse profiter des crédits au développement. La coordinatrice spéciale de l'ONU pour le Liban, Sigrid Kaag, a ainsi estimé que si le travail des institutions constitutionnelles libanaises n’était pas régulé, le pays risquait de perdre les aides et les crédits qui lui sont alloués. La diplomate onusienne a précisé que cette régulation passait par l'élection d'un nouveau chef de l'Etat. Le poste de président de la République est vacant depuis la fin du mandat de Michel Sleiman, en mai 2014.
Le directeur de la Banque mondiale pour la zone Mena, Farid Belhaj, a été plus explicite. Il a affirmé, en juillet, que le blocage des institutions risquait de faire perdre au Liban des prêts d'un montant de 1,1 milliard de dollars, dont les protocoles doivent être approuvés par le gouvernement et le Parlement. Or, en raison de la crise politique, le cabinet se réunit rarement, et la Chambre des députés ne légifère plus depuis près d'un an.
Construction d’écoles en attente
Une des premières conséquences du non-respect des délais par les institutions libanaises a été l'annulation, fin juillet, d'une aide octroyée par l'Agence française pour le développement (AFD). Il s'agit d'un prêt subventionné de 46 millions d'euros, qui devait essentiellement servir à la construction d'écoles. Accordé en 2012, ce crédit avait vu son échéance reportée plusieurs fois. Mais malgré les avertissements de Paris, la dernière échéance, le 30 juin dernier, est passée, sans même que le projet ait été une seule fois inscrit à l'ordre du jour du gouvernement.
D'ailleurs, les blocages institutionnels au Liban ont poussé l'agence française à réduire ses engagements financiers de 95 %. En 2014, ils n'ont pas dépassé les 3,5 millions d'euros, comparés aux 66 millions d'euros de 2013.
Efforts payants
Pour tenter de sauver ce qui peut encore l'être, le Liban cherche à obtenir des rallonges pour la ratification des crédits par ses institutions. Certains de ces efforts ont payé. Le Liban a ainsi obtenu un nouveau délai, qui expire le 31 octobre prochain, pour voter au Parlement un prêt de 474 millions de dollars alloué par la Banque mondiale. Il s'agit du plus important crédit jamais accordé au Liban par cette institution.
Généralement, la Banque mondiale peut accorder des rallonges à deux reprises, seulement si les processus de ratification accusent des retards techniques. Les blocages politiques ne sont pas jugés comme des raisons convaincantes pour l'extension des délais. Le Liban a obtenu une exception, pour une fois seulement. Si le prêt n'est pas voté dans les délais par le Parlement, il ne pourra pas construire le barrage de Bisri, censé fournir de l'eau à 1,6 million d'habitants de Beyrouth et du Mont-Liban, dont un demi-million de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté.