Irak: le dirigeant chiite Moqtada Sadr somme Maliki de partir

Le Premier ministre irakien se retrouve chaque jour plus isolé sur la scène internationale et nationale, y compris au sein de sa communauté, les chiites. Dans un communiqué publié sur son site internet samedi soir, Moqtada Sadr, chef de la plus puissante des milices chiites, estime que Nouri al-Maliki a engagé le pays dans des « contentieux durables sur la sécurité et dans des crises politiques majeures ». En clair, il est jugé responsable de la crise ouverte avec la communauté sunnite, et donc du conflit qui frappe actuellement l'Irak.

Les pressions ont beau s’accumuler à son encontre, pas question de jeter l’éponge. Le Premier ministre irakien, accusé d’avoir délibérément écarté la communauté sunnite de tous les rouages politiques et économiques du pays, affirme que son parti a remporté les élections législatives d’avril dernier et que, par conséquent, il continuera d'exercer ses fonctions. Au sein même de son parti, des voix s'élèvent pourtant pour réclamer son départ. Mais rien n’y fait.

Cette fois, c’est son rival chiite Moqtada Sadr qui le somme de s’en aller. Selon lui, « empêcher Maliki, au pouvoir depuis 2006, d'accomplir un troisième mandat constituerait une mesure salutaire ». Cinglant.

L'homme est connu pour son franc-parler, mais aussi pour son intransigeance et sa détermination. Contre l'avis de Maliki, il avait déjà constitué une redoutable milice, l’Armée du Mahdi, qui avait pris les armes contre les soldats américains - notamment dans les villes saintes du chiisme à Najaf et Kerbala. L’armée américaine n’était jamais parvenue à le défaire. Ce n’est que quand les Etats-Unis ont désinvesti l’Irak qu’il a consenti à déposer les armes. Mais l’homme est désormais prêt à les reprendre pour combattre les jihadistes de l’Etat islamique (EI).

Même l'Iran semble enclin à le lâcher

Le Premier ministre irakien est donc de plus en plus isolé au fur et à mesure que les jours passent. Ses principaux alliés traditionnels l’abandonnent tandis que ses ennemis ne cessent de réclamer son départ. Même le régime iranien, allié le plus fidèle de Maliki, s’accommoderait d’une autre personnalité, rapporte notre correspondant à Téhéran Siavosh Ghazi, à condition que les députés irakiens choisissent un autre Premier ministre.

C'est d'ailleurs la toute première fois que l'Iran s'exprime en ce sens. « Si Nouri al-Maliki est présenté comme Premier ministre (...) nous le soutiendrons avec force », a néanmoins déclaré le vice-ministre iranien des Affaires étrangères. Mais, nuance : si une autre personne est choisie par le Parlement irakien, l'Iran la soutiendra également. « C'est une affaire intérieure irakienne », conclut Hossein Amir-Abdollahian.

Le Parlement irakien doit se réunir de nouveau mardi pour élire les principaux dirigeants du pays. Les Etats-Unis et les pays arabes sunnites de la région critiquent Nouri al-Maliki. Sa politique, jugent-ils, a abouti à la marginalisation des sunnites et des Kurdes du pouvoir. Ils réclament un gouvernement d'union nationale, alors que les jihadistes de l'Etat islamique ont pris le contrôle d'une partie de l'Irak et proclamé un califat, et que les Kurdes d'Irak ont annoncé un référendum pour créer leur propre Etat.

Téhéran, sur ces deux derniers points, n'a en revanche pas changé d'avis. La République islamique rejette la création d'un Etat kurde, et s'est dit prêt à apporter une aide militaire au gouvernement irakien pour lutter contre les jihadistes.

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