Reportage à Bagdad de nos envoyés spéciaux, Boris Vichith et Daniel Vallot
Cela fait trois mois que cette femme sunnite rencontrée dans la capitale irakienne, et qui refuse de donner son nom par crainte des représailles, est à la recherche de son frère. Il s'agit d'un jeune père de famille arrêté à son domicile, en pleine nuit, par un groupe de miliciens : « Nous ne savons toujours pas où il se trouve ! Je suis allé partout… Il est jeune, et il a une famille à charge, sa femme, son père et ses enfants ! On ne sait pas ce qui lui est arrivé : capturé, tué, torturé ? On ne sait pas ! »
La disparition de cet homme est loin d’être un cas isolé à Bagdad, où les milices profitent de leur force pour rançonner les habitants, ou pour les terroriser. Anas Alhialy dirige une association caritative qui s’occupe notamment de prendre en charge les proches de personnes disparues. Pour elle, « le nombre d’enlèvements ne cesse d’augmenter. Nous essayons de nous occuper des femmes et des enfants des disparus, mais nous craignons qu’avec ce qui se passe, en ce moment, il y en ait de plus en plus. »
Face à l’offensive menée par les jihadistes de l’Etat islamique, le gouvernement irakien a donné carte blanche aux milices pour aider l’armée à faire front, avec une conséquence dans les quartiers sunnites de Bagdad : la crainte désormais permanente d’être embarqué à son tour, par des hommes armés, et de ne jamais retrouver ses proches.