Pour les Kurdes irakiens, il y a un avant et un après juin 2014. Lorsque les jihadistes ont réalisé leur spectaculaire percée le mois dernier, l'armée nationale irakienne a reculé, mais pas les Peshmergas, la force armée du Kurdistan autonome. Les Peshmergas ont tenu leur territoire et ils ont même étendu leur zone de contrôle, jusqu'à Kirkouk, cette ville riche en pétrole, revendiquée par les Kurdes, mais que Bagdad refusait jusque-là de leur céder.
Le président du Kurdistan autonome Massoud Barzani martèle que Kirkouk restera dans le giron kurde. Et ce jeudi, devant son Parlement régional, il a demandé l'organisation d'un référendum d'autodétermination du Kurdistan. Aucune date n'est évoquée pour l'instant, mais les Kurdes relancent clairement leur marche vers l'indépendance, au moment même où l'Irak apparait menacé d'implosion.
La perspective d'un Kurdistan indépendant concerne toute la région, avec des conséquences possibles sur les autres pays où vivent des communautés kurdes, la Turquie, la Syrie et l'Iran. (→ À (RE)LIRE : Les Kurdes, un peuple, quatre territoires, quatre histoires)
L'idée d'un référendum au Kurdistan mal accueillie aux Etats-Unis
Avec notre correspondante à Washington, Anne-Marie Capomaccio
La Maison Blanche continue d’insister auprès de toutes les tendances à Bagdad pour obtenir une « union nationale », d’autant que d’après le pentagone, l’armée irakienne est loin d’être prête aujourd’hui à combattre pour reprendre le territoire cédé à l’EI. Les forces spéciales américaines présentes à Bagdad depuis quelques jours ont commencé à récolter des renseignements afin d’établir une évaluation précise de la situation.
L’objectif premier du Pentagone est de stabiliser les positions. Certes, les Etats-Unis sont prêts à intervenir si les intérêts américains sont menacés expliquait hier le Général Dempsey, mais selon le chef d’état-major des armées américaines, il est prématuré de penser à une offensive de reconquête. « Si vous me demandez si les Irakiens seront capables de repousser l’offensive et de reconquérir les territoires perdus en Irak, probablement pas en comptant sur leurs propres forces. La première étape d’une telle campagne est de s’assurer que nous avons un partenaire irakien fiable, et qui est impliqué. Si la réponse à cela est non, alors l’avenir est bien sombre. »
Une armée irakienne qui n’est pas en mesure de reconquérir le territoire perdu, une union nationale qui tarde à se concrétiser, des velléités d’indépendance au Kurdistan : le diagnostic du Pentagone et de la Maison Blanche n’est pas très encourageant.
Rejetant les appels urgents de Bagdad et les pressions politiques en interne, l’administration Obama, de l’aveu même du ministre de la Défense, se prépare à une action ciblée et sur le long terme en Irak.