Toute la zone occidentale de l'Irak sous contrôle des jihadistes

En 48 heures, les combattants de l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) se sont emparés de trois villes importantes de la province d'al-Anbar qui est désormais sous leur contrôle et ont achevé la prise de contrôle de Tal Afar dans la province de Ninive. Depuis la chute de Mossoul, rien ne semble pouvoir freiner l'avancée des djihadistes vers Bagdad.

Une autre ville stratégique serait tombée ce lundi matin entre les mains des insurgés (voir carte ci-dessous). La ville de Tal Afar était partiellement contrôlée depuis le milieu de la semaine dernière par les insurgés, et les forces irakiennes tentaient d'éviter une prise de contrôle totale. Mais ce lundi matin, plusieurs sources citées par l'Agence France Presse font état d'un retrait total de l'armée irakienne.

Cette nouvelle prise est très importante à plusieurs titres. D'abord parce que Tal Afar était une enclave chiite au sein de la province de Ninive. Ensuite parce qu'elle est située entre la ville de Mossoul, contrôlée par les insurgés, et la frontière syrienne : elle va donc permettre à ces insurgés de faire le lien avec les combattants de l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) qui se battent de l'autre côté de la frontière, en Syrie. Enfin elle dispose d'un aéroport qui avait une importance stratégique essentielle pour l'armée irakienne pour convoyer des hommes et du matériel. 

Avec la chute de Tal Afar, l'EIIL et ses alliés sunnites continuent donc de porter des coups très durs à leurs adversaires, avec en ligne de mire, le contrôle de tout l'Ouest irakien.

Après Ninive, al-Anbar, berceau des tribus sunnites

Après avoir pris samedi le contrôle d'al-Qaïm, poste-frontière avec la Syrie, puis la ville de Rutba à 150 km de la Jordanie, les jihadistes ont pris dimanche le poste-frontière avec la Jordanie, rapporte notre correspondante à Amman, Angélique Ferat. Il est tombé, ainsi que les villes d’Haditha et de Rawa, qui sont des points stratégiques. À Ramadi quelques centaines de soldats encerclés négocient leur reddition. Les jihadistes irakiens contrôlent donc toute la région d’al-Anbar à l’ouest de l’Irak, après avoir pris le contrôle de celle de Ninive au début du mois.

Al-Anbar est la plus grande région d’Irak et c’est le berceau des tribus sunnites. C’est là que les manifestations ont commencé en janvier 2013 pour dénoncer la corruption et la discrimination du gouvernement contre les sunnites. C’est de là aussi qu’est partie la rébellion en janvier de cette année lorsque le Premier ministre irakien a lancé une opération militaire pour éradiquer l’Armée islamique d’Irak. Les tribus ont alors pris les armes, accusant le Premier ministre de vouloir étouffer la contestation des sunnites en se couvrant avec une opération antiterroriste. Depuis, elles combattent aux côtés des jihadistes.

Changement de stratégie de l’EIIL ?

L’avancée des jihadistes de l’EIIL vers Bagdad est ralentie au nord dans la région de Samarra. Les combats sont intenses mais Samarra résiste et la raffinerie de Baïji n'est toujours pas sous leur contrôle.

La stratégie est donc de mieux tenir les régions sunnites qui leur sont acquises, c'est-à-dire Ninive et al-Anbar, pour établir de solides bases arrière. Les jihadistes contrôlent la route entre Bagdad et Amman, la capitale jordanienne, le poste-frontière avec la Syrie et près de 1000 km de frontière entre la Syrie, la Jordanie et l’Irak. Mais ils se rapprochent aussi de Bagdad. Fallouja, ville emblématique pour les rebelles dans la région d’al-Anbar, est à 50km de la capitale irakienne.

Certains verront dans cette stratégie la naissance d'un Etat islamique d’Irak et du Levant à cheval sur la Syrie et l’Irak. D’autres y verront les prémisses d’une région sunnite irakienne autonome sur le modèle de la région autonome kurde au nord.

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