L’Iran de Hassan Rohani n’a plus rien à voir avec celui de son prédécesseur. « L’Iran néglige les puissances occidentales arrogantes » ou encore « Israël est une tumeur cancéreuse », ces propos virulents tenus à la tribune des Nations unies à New York par l’ancien président iranien Mahmoud Ahmadinejad, font désormais partie du passé.
Hassan Rohani, lui, adopte un tout autre style. Il tient un discours plus conciliant en dosant avec subtilité compromis et fermeté. « Les armes nucléaires et les autres armes de destruction massive n’ont pas leur place dans la doctrine de défense et de sécurité de l’Iran. Elles contredisent nos convictions et éthiques fondamentales », a ainsi rassuré le nouveau président iranien lors de son allocution à l’Assemblée générale de l’ONU.
Toutefois, même s’il y a cette volonté affichée d’aller de l’avant, hors de question pour Hassan Rohani de se laisser marcher sur les pieds. Il n’a pas manqué de dénoncer l’embargo américain et les sanctions économiques subis par son pays. « Hassan Rohani a voulu tenir tête aux Etats-Unis. Il a insisté sur un certain nombre de principes défendus par son pays. Mais il a su montrer qu’il voulait sérieusement trouver une solution à l’ensemble des contentieux qui opposent Iraniens et Américains », analyse Azadé Kiane, spécialiste de l’Iran. Selon cette professeure de sciences politiques à l’Université Paris-VII Diderot, le régime iranien va agir de manière responsable aussi bien sur son dossier nucléaire, dans lequel il plaide pour plus de transparence, que sur la question syrienne en tentant de trouver une issue à cette crise.
L’Iran favorable au départ de Bachar al-Assad ?
L’Iran joue presque aussi gros sur le dossier syrien que sur son programme nucléaire. C'est-à-dire son influence dans la région. Mais ce qui se passe en Syrie est dramatique. De plus, les jihadistes financés par les monarchies du Golfe - ennemies de l’Iran - sont en train de l’emporter sur le terrain.
Réalisme politique oblige, et pour éviter de perdre son principal allié, Téhéran est dans l’obligation de trouver une issue à la crise syrienne. « Hassan Rohani est pour un changement graduel et pacifique en Syrie. Si le régime de Bachar el-Assad est renversé, l’Iran craint qu’il ne soit remplacé par un nouveau régime hostile à Téhéran et donc aux chiites », explique Azadé Kiane. « L’Iran n’est donc pas contre le départ de Bachar el-Assad. L’essentiel est que son successeur préserve l’amitié historique entretenue par les deux pays », détaille la professeure.
« Hypocrite », selon Israël
Pour son déplacement à l’Assemblée générale des Nations unies à New York, Hassan Rohani était accompagné d’un député juif iranien. Mais selon certains experts, même si le nouveau président iranien a condamné l’Holocauste, il ne faut pas s’attendre à un miracle dans les relations entre l’Iran, l’Etat hébreu et les Etats-Unis. D’autant qu’Israël a, dans un communiqué, qualifié les nouvelles autorités iraniennes de « cyniques » et « de totalement hypocrites ». Cette rhétorique pacifique dont fait preuve l’Iran agace clairement Israël. Selon la professeure Azadé Kiane, « l’Etat hébreu a toujours besoin d’un grand ennemi pour se poser en victime ».
En revanche, avec la France, les choses pourraient aller un peu plus vite. « L’Iran et la France ont toujours cherché à trouver des solutions », affirme Bernard Hourcade, directeur de recherche au CNRS. « Avec les Etats-Unis, c’est différent. C’est une véritable guerre froide qui se tient depuis 34 ans. Toutefois, la réunion des 5+1 (cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU plus l’Allemagne), ce jeudi à New York durant laquelle le ministre des Affaires étrangères iranien, Javad Zarif, discutera directement avec le secrétaire d’Etat John Kerry, est un grand changement », constate ce spécialiste.