Téhéran: nouvel attentat contre un spécialiste du nucléaire iranien

Un nouvel attentat à la voiture piégée a eu lieu le 11 janvier 2012 au matin à Téhéran. Mostafa Ahmadi Roshan, un scientifique qui travaillait sur le site nucléaire iranien de Natanz a été tué dans l'explosion de son véhicule. Les autorités iraniennes accusent Israël de cet attentat, le troisième du genre en moins de deux ans.

Avec notre correspondant à Téhéran, Siavosh Ghazi

Mostafa Ahmadi Roshan était âgé de 32 ans seulement. Il était le vice-directeur du site nucléaire de Natanz qui est le principal site d’enrichissement iranien, situé dans le centre du pays. 8 000 centrifugeuses sont actuellement en fonctionnement dans ce lieu, très important pour l'industrie atomique iranienne.

Cet ingénieur chimiste travaillait sur un projet très pointu de séparation de gaz, destinée à améliorer l'enrichissement d'uranium.

L'homme a été tué alors qu’il  circulait en voiture. Un motard a posé une bombe magnétique contre son véhicule, qui a explosé, tuant le scientifique et blessant deux autres passagers qui se trouvaient dans la voiture.

Le vice-gouverneur de Téhéran, Safar-Ali Baratloo, a accusé immédiatement Israël d’être responsable de l’attentat. Il a affirmé que la méthode utilisée ressemblait à celle utilisée ces deux dernières années dans des attentats contre des scientifiques nucléaires iraniens.

Cet attentat intervient alors que l'Iran a démarré cette semaine l'enrichissement d'uranium dans l'usine souterraine de Fordo, près de Qom. Une initiative condamnée par les pays occidentaux dont l'Union européenne, qui annonce de nouvelles sanctions contre l'Iran pour le 23 janvier prochain.

Méthodes similaires

Depuis janvier 2010, deux autres scientifiques iraniens ont été tués dans des attentats similaires : Massoud Ali Mohammadi, un physicien nucléaire avait été tué par l’explosion d’une moto piégée en janvier 2010. Et un scientifique iranien, Majid Shahriari, avait été tué par l’explosion d’une bombe. Le passager d’une moto avait utilisé la même méthode que dans l'attentat d'aujourd'hui.

Majid Shahriari était responsable d’un important projet iranien qui vise à produire du combustible nucléaire pour le réacteur de recherche de Téhéran. Ce sont donc des scientifiques nucléaires très importants qui ont été visés ces deux dernières années.

L’actuel chef de l’Organisation iranienne de l’énergie atomique (OIEA),
Fereydoun Abbasi a échappé à un attentat le même jour que Majid Sharhriari, parce qu’il a eu le réflexe de quitter sa voiture lorsqu’il a vu un homme en moto poser une bombe contre sa voiture.

Aucune réaction à Jérusalem

Silence complet des autorités israéliennes face à la longue liste des opérations non-revendiquées contre le programme nucléaire de l’Iran, un programme qui inquiète l’Etat hébreu depuis des années.

L’assassinat de ce matin est le quatrième à coûter la vie à un scientifique iranien en 2 ans et il survient après une série d’explosions mystérieuses : 7 morts en décembre 2011 à Yazd, l’un des sites du programme nucléaire de la République islamique. Le 28 novembre, c’est près d’un autre site sensible, à Ispahan, que des témoins rapportaient une violente déflagration. Et quelques jours plus tôt, une importante base des Gardiens de la Révolution (la force d’élite du régime) était dévastée par une explosion. Parmi les victimes, l’un des hommes chargé du développement des missiles iraniens.

Plusieurs spécialistes du renseignement attribuent cette série noire au Mossad, les services secrets israéliens. Meir Dagan, l’ancien chef de l’Agence, serait l’architecte de cette guerre clandestine, poursuivie par son successeur Tamir Pardo. En Israël, on ne doute pas de la capacité du Mossad à mener à bien de telles opérations. Leur exécution pourrait s’appuyer sur des réseaux d’opposants iraniens.
 

Vienne, où est installée l'AIEA

Le scientifique iranien M.A. Roshan, assassiné ce matin à Téhéran, ne figurait pas sur la liste des scientifiques soupçonnés par l'AIEA de participer au volet militaire du programme nucléaire clandestin iranien.

C'est un détail qui a son importance car en novembre, lors du dernier conseil des gouverneurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique, l'Iran avait accusé l'AIEA d'avoir quasiment invité les États-Unis et Israël à tuer ses scientifiques en leur fournissant une liste tenue à jour.

Il semble donc que les commanditaires du meurtre aient veillé à ce que le gendarme du nucléaire ne puisse faire l'objet d'aucun reproche de la part de la République islamique.

Avec nos correspondants à Jérusalem et à Vienne, Nicolas Falez et Blaise Gauquelin

 

Partager :