Au coeur de Sanaa, la place du changement s'est largement vidée de ses manifestants pacifiques. De sit-in en défilés, ils avaient pourtant fait face à mains nues à près de quatre mois de répression sanglante. Mais avec l'entrée en lice le 23 mai dernier des milices de la principale confédération tribale, la scène politique s'est muée en champ de bataille. La contestation populaire s'est effacée derrière le combat à mort qui oppose désormais le puissant Cheikh Sadek al-Ahmar au président Saleh.
Ce sont de véritables corps d'armée qui s'affrontent désormais dans les rues de la capitale à coup de canon, entre la résidence de cheikh Amar et le palais présidentiel. Les civils qui le peuvent fuient la ville. Les opposants non armés ne se risquent plus guère dans les rues.
Lâché par les siens, par sa tribu des Hached et par certains de ses chefs militaires, le président Saleh refuse de quitter le pouvoir. Il tente de retourner à son profit la nouvelle configuration armée du conflit en jouant de la menace terroriste d'al-Qaïda. Une carte à usage externe qu'il agite en particulier autour de la situation de Zinjibar, une ville du Sud où les forces gouvernementales paraissent avoir perdu la partie.