Au troisième siècle, l’Egypte était copte

Monophysite, l’Eglise orthodoxe copte répond aujourd’hui au patriarche Chenouda III. Sa fondation remonte au temps d’Hérode dont la menace sur les enfants d’Israël conduisit pour quelques jours la Sainte-Famille en Egypte. Comme l’explique à Monique Mas le professeur Melad Hana de l’université du Caire, c’est un Libyen, disciple de Jésus, l’évangéliste Marc, qui est venu prêcher la bonne parole vers l’an 45 de l’ère chrétienne, quelque 3 000 ans après l’avènement du pouvoir pharaonique (vers 2686 avant Jésus-Christ) et mille ans après son effondrement.

Après le temps des pharaons, l’Egypte a connu un pouvoir libyen jusqu’en 747 avant Jésus-Christ, suivi par une emprise des Kouchites du Sud puis des Perses. La période gréco-romaine commence avec Alexandre le Grand en 332 avant JC. Elle se poursuit sous Ptolémée et Cléopâtre au premier siècle avant l’ère chrétienne (entre l’an - 51 et – 30) et dure jusqu’au Ve siècle de l’ère chrétienne. L’islam est arrivé en Egypte avec les Fatimides, comme le rappelle le professeur Melad Hana, membre du Conseil suprême de la culture. Copte, il n’est pas très pratiquant mais montre avec fierté la croix copte tatouée sur son bras droit lors de son premier pèlerinage à Jérusalem, al-Qods, une manifestation de piété désormais interdite par le Chenouda III, conformément aux recommandations gouvernementales de boycott d’Israël.

Melad Hana : Pour les Coptes, se rendre sur les lieux mêmes des événements de Pâques, c’est un pèlerinage. Et là vous faites ce tatouage, vous marquez l’année. Et normalement vous recevez aussi un titre de Hadj comme les musulmans. Mais eux, ils vont à La Mecque pour être Hadj. Les Coptes, c’est à Jérusalem, al-Qods, que vont les pèlerins coptes.

RFI : Qui sont les Coptes ?

MH : Copte, c’est un mot pharaonique qui veut dire Egyptos, c’est-à-dire Egyptiens. Notre origine est « vraiment » égyptienne. C’est ce que ça signifie.

RFI : Quand les Coptes ont-ils rencontrés le christianisme ?

MH : Le christianisme est arrivé ici avec saint Marc, l’un de ceux qui ont écrit les évangiles de la Bible. Saint Marc n’était pas égyptien. Il était libyen. Mais c’est lui qui est venu prêcher le christianisme en Egypte pendant la première moitié du premier siècle de l’ère chrétienne. Ça n’a rien à voir avec l’époque pharaonique. Le temps des pharaons, c’était avant l’arrivée du christianisme. Saint Marc, lui, c’était un disciple de Jésus, un des quatre rédacteurs des Evangiles, le nouveau Testament. Il y avait saint Mathieu, saint Luc, saint Marc et saint Jean.

RFI : Ensuite est venu le temps de l’islam. Que sont devenus les Coptes sous la majorité musulmane ?

MH : En Egypte, les Coptes sont plus anciens que les musulmans. Au temps où les Romains gouvernaient l’Egypte, le christianisme est arrivé avec saint Marc. Ça ne s’est pas fait en un jour. Ils se sont convertis pendant le premier et le deuxième siècle après Jésus-Christ. Au troisième siècle presque toute l’Egypte était devenue chrétienne, orthodoxe, et donc copte.

RFI : Aujourd’hui les coptes sont une minorité ?

MH : C’est vrai, ils sont une minorité aujourd’hui, mais au troisième siècle, l’Egypte était entièrement copte. L’Etat était entièrement copte. La population était de deux à trois millions de personnes à l’époque. Quand au début de l’ère musulmane, au VIIe siècle, l’islam a envahi l’Egypte, les Coptes ont peu à peu été forcés de se convertir. Au Xe siècle, le pouvoir des Fatimides a essayé de convertir l’Egypte au chiisme. Mais finalement, peu à peu, au douzième siècle, beaucoup d’Egyptiens étaient devenus des musulmans sunnites et non pas des chiites. Mais les Coptes sont restés coptes jusqu’à aujourd’hui.

RFI : D’après vous peut-on parler de problème copte aujourd’hui en Egypte ?

MH : Non, non. Vous savez, les Coptes sont aussi anciens que le christianisme. Nous sommes coptes depuis dix-neuf siècles maintenant et ça va continuer comme ça.

RFI : Pourtant, il y a quelques mois, des Coptes sont morts dans des affrontements avec des musulmans qui voulaient s’opposer à la construction d’une église. Qu’est-ce que ça signifie. Qu’est-ce qui s’est passé. Vous pensez vraiment qu’il n’y a pas de problème ?

MH : Moi, je vis ici, dans cette maison. Je suis le propriétaire de cette maison. Je suis quelqu’un de très connu en Egypte, une personne très importante ici. J’ai des gardes dehors. Personne ne peut me toucher ici. Je le tuerais. Nous sommes très heureux ici. Nous les Coptes, nous sommes pour la plupart plus riches que les musulmans. Et les Coptes sont plus éduqués que les musulmans. Les Coptes vivent très bien en Egypte. Ils sont la crème du pays. Nous n’éprouvons aucun sentiment d’humiliation du tout. Nous sommes libres de faire ce que nous voulons. Je vais à l’église si je veux. Sinon je n’y vais pas. Les Coptes appartiennent pour la plupart à la classe moyenne supérieure. Nous n’appartenons à rien d’autre qu’à l’Egypte. Et nous sentons que nous appartenons à la culture de l’ancienne Egypte. Je suis un professeur d’université. Je suis membre du Conseil de la culture… Je suis un membre éminent de l’intelligentsia égyptienne. Les Coptes ont une place importante dans l’Etat égyptien, mais pas forcément au gouvernement. Et d’ailleurs, le gouvernement peut faire des lois d’urgence aussi longtemps qu’il le voudra et avoir le pouvoir qu’il veut. Personne ne me touchera ici. Jamais personne ne me touchera.
 

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