En longeant les quais situés entre les Invalides et le pont de l’Alma, Parisiens et touristes confondus sont assaillis par une multitude d’odeurs qui donnent faim. Coriandre, citronnelle, viande grillée... tout se mélange et intrigue les passants qui cherchent à connaître l’origine de ces effluves. Il suffit de se pencher par-dessus le muret de la promenade des quais pour apercevoir le village international de la gastronomie. C’est là que se sont installés le temps d’un week-end ensoleillé une trentaine de chapiteaux blancs.
Faire découvrir son patrimoine culinaire
Des stands thaïlandais d’où s’échappe une odeur de jasmin au yaourt bulgare en passant par les beignets de viande argentins, tous les gourmands trouvent leur bonheur. Au stand des Antilles, Freddo ne passe pas inaperçu avec son tee-shirt orange vif et son rire contagieux. Il attire les visiteurs curieux grâce à sa bonne humeur et une corbeille qui déborde d’accras de morue. Près de lui se dresse une table couverte de rhums arrangés (à boire avec modération...) qui font saliver les amateurs.
Les visiteurs, qu’ils soient Parisiens en pause déjeuner ou touristes passés par là par hasard, s’agglutinent devant le stand antillais de Freddo. Une touriste libanaise écarquille les yeux lorsqu’elle goûte les accras. « Vous ne pensiez pas que ça pouvait être si bon ? » plaisante Nathalie, une collègue de Freddo. Honnête, la touriste s’avoue plus que surprise par les saveurs antillaises. Si les « métropolitains », comme les appelle Nathalie, sont familiers des accras, le bokit, ce sandwich complet préparé à base de viande ou de poisson très populaire aux Antilles, est une découverte pour beaucoup d’entre eux. « Notre bokit est préparé avec une pâte faite maison. C’est un sandwich, mais c’est un plat équilibré, une alternative à la malbouffe qu’on trouve partout aujourd’hui », ajoute Nathalie.
C’est dans cette optique de partage et de transmission qu’Anne-Laure Descombin, organisatrice de l’événement et cofondatrice de l’association Cuisines populaires et cultures du monde, a monté le projet. « La cuisine donne l’opportunité de faire s’assoir des personnes de tous horizons autour d’une table et de leur faire partager un vrai moment de convivialité. Tout le monde a besoin de manger, on a tous ça en commun. Ce week-end est une opportunité de faire découvrir des cuisines du monde entier et de les promouvoir », estime-t-elle.
A quelques mètres des Antilles, le Pakistan participe pour la première fois à la fête de la gastronomie. Pour l’occasion, deux restaurants exposent en grande pompe. Le stand est décoré de tapis colorés et d’objets en bronze étincelants qui créent une atmosphère toute particulière. Une dizaine de personnes s’affairent derrière le stand pendant que deux hommes en tuniques brodées installés par terre jouent et chantent des musiques traditionnelles. L’odeur du poulet biryani et des samoussas à la viande embaument l’espace. « La cuisine pakistanaise est la meilleure du monde », affirme Abdullah avec le sourire. Il est l’un des membres de l’ambassade du Pakistan qui s’est assuré de la présence de son pays ce week-end. « Nous sommes ravis de faire partager notre cuisine, car c’est l’un des piliers de la culture pakistanaise », estime-t-il.
La cuisine pour créer du lien
Bien plus que des découvertes culinaires, le Village international de la gastronomie rapproche des gens qui ne se seraient probablement jamais rencontrés. Le stand israélien se glisse entre celui du Sénégal et de la Grèce, Les Etats-Unis ont pour voisin le Niger et la Perse. « C’est une cohabitation symbolique très forte quand on connait les tensions politiques qui peuvent exister entre certains pays », considère Solange, une belle jeune femme qui se cache derrière une paire de grosses lunettes rondes.
Solange travaille au sein de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) et a entendu parler du Village international par le biais de son travail. « En plus de pouvoir faire le tour du monde en passant de stand en stand, la tenue de ce village donne à voir une autre manière de cohabiter. C’est une autre façon de dialoguer qui passe par la cuisine », ajoute-t-elle. Cette cohabitation, elle saute aux yeux : les exposants s’entraident, ils se dépannent.
Un futur chef français en tenue de commis et toque blanche du lycée professionnel Albert-de-Mun passe proposer des mini toasts de foie gras aux cuistots des autres stands. Ces derniers acceptent avec plaisir ce petit morceau de France. En échange, ils font, eux aussi, goûter leurs spécialités au jeune étudiant. « A l’origine, nous avions dix stands et nous avons réussi à accueillir trente-sept pays, c’est une réussite. Nous espérons avoir environ 30 000 visiteurs ce week-end », ajoute avec enthousiasme Anne-Laure Descombin qui a organisé l'événement. Les visiteurs, eux aussi, sont une marque de la diversité qui anime le projet. On peut entendre parler toutes les langues du monde, tous les styles vestimentaires s’affichent. Grâce au Village international de la gastronomie, le tour du monde se fait désormais en trois jours.