Jungle de Calais: les échoppes, des «lieux de rencontre apaisés» selon le juge

Les échoppes de la jungle de Calais ne seront pas détruites. La justice a rejeté vendredi 12 août la demande de l'Etat d'abattre les murs des quelque 72 commerces illégaux installés dans cette lande du nord de la France où des milliers de migrants vivent toujours et où d’autres continuent à arriver. Quelque 2 000 migrants supplémentaires sont arrivés en juillet dans la jungle de Calais, où s'entassent désormais 9 000 personnes dans des conditions de vie extrêmement précaires.

Le tribunal administratif de Lille a donc débouté la préfecture, qui avait demandé la fermeture de ces échoppes, estimant que « les conditions d'urgence et d'utilité requises » par la loi n'étaient pas remplies pour justifier une destruction. Le juge reconnaît que ces commerces « ne bénéficient d'aucune autorisation administrative » et que certains « ne respectent pas les règles sanitaires les plus élémentaires ». Toutefois, pointe le juge, « ces épiceries, cafés, restaurants remplissent d'autres fonctions » que l'alimentation des migrants qui « vivent dans des conditions de précarité extrême et de total désœuvrement ». Ces lieux, conclut-il dans son communiqué, « constituent des lieux de rencontre apaisés entre migrants » aussi la disparition de ces petits commerces « de façon indifférenciée se ferait indéniablement au détriment des migrants ».

Une réouverture de ces épiceries fermées par la police fin juillet est donc envisageable. « Notre première réaction c’est d’être contents que le juge ait entendu nos arguments, se félicite François Guennoc, vice-président de l'association l'Auberge des migrants. Ces lieux n’étaient pas seulement des endroits où on préparait dans des conditions pas très bonnes sur le plan sanitaire ou de la sécurité du public des aliments. C’était aussi des lieux où on peut charger son téléphone, se mettre à l’abri, il y en a qui servait d’école, il y avait un point de distribution de repas gratuit, des lieux aussi qui accueillaient les nouveaux arrivants ». Le juge a été sensible à ces arguments. 

« Ça permet aujourd’hui d’ouvrir peut-être, on espère, un débat sur des questions importantes sur le camp avec la préfecture », poursuit François Guennoc.Un débat d'autant plus nécessaire que « la situation alimentaire par exemple est extrêmement tendue et le rôle que jouait les épiceries et les restaurants étaient importants parce qu’il y a des gens qui ne peuvent pas ou qui ne veulent pas aller dans les files d’attente, parce qu’il faut attendre 3h pour avoir un plat et un repas, et c’est difficile sur le plan de la dignité, c’est difficile sur le plan même de la sécurité, donc ces restaurants, ces épiceries, avaient un rôle très important sur le camp et le juge l’a compris. »

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