A Paris et dans plusieurs grandes villes de l'Hexagone plus de 170 000 personnes ont défilé contre le projet de loi El Khomri, selon les autorités. La CGT revendique 500 000 manifestants, affirmant que la mobilisation « est désormais ancrée dans le pays ». A Paris, 60 000 personnes, selon la CGT, et entre 14 000 et 15 000 selon la préfecture, ont pris part à la manifestation.
Les sept syndicats opposés au projet ont fait mieux que le 9 avril, lorsque 120 000 personnes avaient défilé, mais la mobilisation est moindre que lors des précédents rassemblements : au plus fort de la contestation, le 31 mars, les autorités avaient recensé 390 000 personnes et les syndicats, 1,2 million.
« Bien évidemment que les forces s’épuisent, c’est long, c’est difficile, un gouvernement qui ne répond pas et qui s’obstine à ne pas répondre. Donc on voit bien que le gouvernement joue la carte du pourrissement, pariant sur le fait que tout cela va bien finir par s’éteindre et mourir de sa belle mort », assure Bernadette Groison, secrétaire générale de la Fédération syndicale unitaire (FSU). « Le gouvernement aurait tort de faire ce pari puisque même si la mobilisation diminuait le problème resterait entier », ajoute-t-elle.
Le mouvement toujours debout
Moins de monde, est-ce un signe d'essoufflement ? « Non », répond cette étudiante en droit et membre du collectif « Nuit Debout ». « Plus le temps passera, plus les personnes vont nous rejoindre dans la rue parce qu’il y a des actions, parce qu’il y a une mobilisation et parce que surtout il y a un ras-le-bol. Alors, au contraire plus on tiendra plus les gens nous rejoindrons », souligne Laurène Vivier. « La loi El Khomri illustre bien le système que l’on veut détruire. Elle précarise comme d’habitude les plus vulnérables », souligne-t-elle.
Les opposants au projet de réforme du Code du travail prévoient deux nouvelles journées de mobilisation, dimanche1er mai et mardi prochain, le 3.
De nombreuses interpellations
Une mobilisation qui se radicalise. Des débordements et des heurts avec les forces de l'ordre se sont produits en marge des manifestations dans plusieurs villes, notamment à Paris, Nantes, Rennes et Marseille où 57 personnes ont été interpellées à la fin de la manifestation. Jets de projectiles de manifestants en direction des forces de l'ordre et incendies de poubelles ont émaillé la manifestation marseillaise qui a réuni 4 800 manifestants, selon le préfet de police, mais 75 000 selon la CGT et 30 000 selon FO.
A Bordeaux, où 3 000 à 6 000 personnes ont manifesté, selon les différentes sources, quatre jeunes ont été interpellés après des heurts avec les forces de l'ordre. A Rennes, où les syndicats ont dénombré 13 000 manifestants et la préfecture 4 000, des heurts ont éclaté avec les forces de l'ordre et six personnes ont été interpellées.
Dix-neuf personnes ont été interpellées à Nantes après un défilé qui a réuni près de 10 000 manifestants, selon les organisateurs. Des arrêts de bus ont été vandalisés, des poubelles mises à feu, et une voiture incendiée.
« Violences intolérables »
A Paris, plusieurs dizaines de manifestants ont lancé des bouteilles, des pavés et des extincteurs contre les forces de l'ordre à l'entrée du pont d'Austerlitz, sur la rive gauche de la Seine. Les policiers ont riposté à coups de gaz lacrymogènes. Des CRS sont venus en renfort. A travers la France,24 policiers ou gendarmes ont été blessés dont trois très grièvement, a annoncé le ministère de l'Intérieur, ajoutant que 124 personnes ont été interpellées.
Bernard Cazeneuve, le ministre de l'Intérieur, a appelé les syndicats à condamner le plus fermement possible cette violence. Alors que de l'autre côté, l'Unef, le principal syndicat étudiant, dénonce un usage disproportionné de la force par la police.
En voyage à Nouméa, le Premier ministre Manuel Valls a lui condamné des violences « inacceptables », « intolérables ». « S'en prendre ainsi à des policiers et à des gendarmes, c'est s'en prendre à l'autorité, à l'état de droit et à la République », a-t-il affirmé, en appelant à la « responsabilité de chacun ».