Université d'été du PS: le chemin de croix de Manuel Valls

Ce samedi 30 août, pendant toute la journée, Manuel Valls a été chahuté. Conspué à son arrivée par des syndicalistes, il a été ensuite critiqué par les socialistes et les communistes invités à l'université d'été du PS. La pression est très forte sur les épaules de Manuel Valls qui a prononcé son discours à la mi-journée.

Avec nos envoyés spéciaux à La Rochelle, Anissa El Jabri et Valérie Gas

Des barrières, 80 policiers en civil surveillant le site : « on n’a jamais vu ça chez nous, on est "bunkérisés" », s’exclame un élu socialiste. Malgré ce dispositif, des syndicalistes ont transformé l’arrivée de Manuel Valls en chemin de croix. « Nous ce qu’on veut, c’est une vraie politique de gauche. Manuel Valls, il nous a complètement trahis », s’insurge l’un d’entre eux. Pour sa première venue en tant que patron du Parti communiste, Pierre Laurent, a fait entendre sa colère : « 2012 avait en quelque sorte établi un contrat avec les Français, pour nous débarrasser de Sarkozy, de sa politique. Cette semaine, ce contrat il vient d’être déchiré. »

Le moins qu’on puisse dire, c’est que l’université d’été de La Rochelle ne s’est pas déroulé cette année dans la sérénité. Claude Bartolone, le président de l’Assemblée nationale, en est sûr, Manuel Valls porte la responsabilité de ce trouble au sein parti : « si j’avais pu conseiller Valls, confie-t-il, je lui aurais dit de faire son premier discours ici, avant de parler devant le Medef. » Et dans les débats internes, ça n’était pas mieux.

Manuel Valls surjoue la décontraction

Un parti qui siffle certains de ses responsables et applaudit ceux d’autres formations, c’est un parti qui a « perdu ses repères », disait un député, visiblement abattu ce samedi dans la soirée. A quelques heures de son discours, Manuel Valls surjoue quant à lui la décontraction. Interrogé sur l’ambiance qui régnait à l’université d’été, il n’hésite pas : « elle est bonne, elle est chaleureuse. C’est normal qu’il y ait beaucoup d’interrogations, mais en même temps c’est ma responsabilité d’apporter des solutions. » Pour lui, le débat au sein du parti, est même « naturel ».

Manuel Valls espère néanmoins fermer la parenthèse des débats à guichets fermés aujourd’hui. Le Premier ministre veut faire de la pédagogie,dans son discours de clôture de ce dimanche. Même s’il a pris soin de dire qu’il ne cherchait pas les applaudissements, mais qu’il cherchait à convaincre, on peut penser que l’un n’ira pas sans l’autre.

Trouver les mots pour rassurer

Convaincre des socialistes échaudés par l’éviction d’Arnaud Montebourg, son remplacement par Emmanuel Macron, les coups de canifs dans le contrat des 35 heures, la révision de la loi sur le logement, la polémique sur le travail du dimanche, cela ne va pas être facile. Manuel Valls a tout fait pour ne pas laisser entendre que les critiques des frondeurs, les provocations de Christiane Taubira ou Martine Aubry, les huées des manifestants avaient prise sur sa détermination à garder le cap. « Les socialistes se posent les mêmes questions que les Français, estime-t-il. Ils attendent d'avoir de l'emploi, que nous luttions contre la vie chère, que nous trouvions des logements, c'est ce que les Français attendent. [...] Les socialistes sont forts, sont utiles au pays quand ils s'adressent aux Français, et pas uniquement à eux-même. »finit-il par lâcher.

Mais il va lui falloir trouver maintenant les mots pour rassurer ces socialistes désabusés souvent, exaspérés parfois, et donner une chance au rassemblement de la famille qu’il désire, mais qui ressemble pour le moment à un vœu pieux.


A Bruxelles, François Hollande demande « un parti à l’unisson »

En marge du Conseil européen, le président français est revenu sur la crise politique de cette semaine, le remaniement du gouvernement et le départ d'Arnaud Montebourg. François Hollande rejette le qualificatif de social-libéral, et demande aux socialistes de soutenir sa politique.

Avec notre envoyé spécial à Bruxelles, Florent Guignard

C’est la première fois qu’on l’entendait depuis la recomposition du gouvernement Valls et non il ne regrette rien, au contraire. C'était une « décision nécessaire », au regard « des comportements ». Une « clarification », qui contribue même au « renforcement de la position française » en Europe. Il n’a pas changé, non plus martelant contre toute évidence que sa politique est « conforme à ses engagements pris devant les Français » en 2012. Et quand on lui demande s’il est social-libéral, il lâche d’abord un petit rire, en levant les yeux au ciel, et il l’affirme : « je suis social-démocrate, donc socialiste… ».

Alors, à l’heure où les socialistes, sa famille, cette famille qu’il a dirigée pendant 10 ans, se déchire, en ce moment, à La Rochelle, François Hollande, visage marqué et voix fatiguée, donne alors l’image d’un président isolé, inquiet sur l’avenir de sa majorité… « J’ai besoin d’avoir un parti à l’unisson ». Un aveu, un appel. Le roi est nu, ou presque. Sera-t-il entendu ? À Bruxelles, François Hollande a au moins obtenu l’organisation d’un sommet sur l’euro. Maigre consolation.

 

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