La démission d’Aquilino Morelle n’a pas tardé. Moins de 24 heures après les révélations de Mediapart il fallait éteindre au plus vite l’incendie qui menaçait la « République exemplaire » chère à François Hollande. Une République déjà bien mise à mal, avec notamment l’affaire Cahuzac.
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Ce vendredi matin, à Clermont-Ferrand, François Hollande a reçu la démission de son conseiller en Communication, Aquilino Morelle, et il ne s'est pas fait prier pour l'accepter. Le désormais ex-conseiller en Communication a ensuite envoyé lui-même un communiqué à l’Agence France-Presse. « Je veux redire que je n'ai commis aucune faute. Je n'ai jamais été en situation de conflit d'intérêts », précise t-il, ajoutant qu'il souhaite « mettre fin à (ses) fonctions "de conseiller du président" » pour « être entièrement libre de répondre (aux) attaques ».
La délégation qui accompagne le président pour cette visite à Clermont-Ferrand chez Michelin, le fabricant de pneus, communique peu sur cette démission et ce vendredi matin la gêne était palpable. François Hollande, en arrivant sur place, s’est refusé à tout commentaire. Pas de déclaration du président, pour une affaire privée, selon l’Elysée, bien antérieure à l’arrivée d’Aquilino Morelle. Pas de commentaires donc, « no statement », a même dit Arnaud Montebourg, le ministre de l’Economie qui accompagne François Hollande et qui connaît bien Aquilino Morelle, puisqu’il était son directeur de campagne pendant la primaire socialiste en 2011. « Vous êtes de sacrés emmerdeurs », a même lancé Arnaud Montebourg à un journaliste.
Une affaire qui parasite le déplacement du chef de l’Etat
Cela faisait deux mois que François Hollande n’était pas allé en province. Un retour au terrain après la correction des municipales, pour renouer le contact avec les Français, avec la visite d’une entreprise symbolique du patrimoine industriel français.
François Hollande a bien sûr vanté une nouvelle fois son pacte de responsabilité pour les entreprises, un pacte bien accueilli par le dirigeants de Michelin, ce qui est loin d’être le cas d’une partie des députés socialistes à Paris. La fronde de la majorité menace, ce qui d’un point de vue politique est sans doute bien plus problématique que la démission d'Aquilino Morelle.
Une majorité désabusée
En effet, au sein de la majorité, on est partagé entre le soulagement d'un départ rapide du conseiller spécial et la colère.
Une colère froide, dit ressentir un député après ces nouvelles révélations. Une grande fureur et une pensée immédiate : « qu'il dégage ». « Ca ne s'arrête décidément jamais », soupire un autre, « même quand on croit avoir tout réglé après le remaniement de l'ensemble du dispositif majoritaire »...
Plus que le conflit d'intérêt - la justice tranchera disent tous les députés -, ce sont les comportements privés pointés par Médiapart qui ont choqué. Un socialiste s’énerve : « se faire cirer des centaines de chaussures dans les palais de la République quand on demande à des gens qui en auront trois ou quatre dans leur vie de faire des efforts, ça n'est pas acceptable ».
A gauche, tout le monde pense au telescopage désastreux entre l'affaire et le plan de rigueur présenté par Manuel Valls de 50 milliards d'euros d’économies. Un cadre socialiste de l'Assemblée plaide quand même : « A droite, quand il y a des affaires c’est le déni ; nous, à gauche, quand il y a un soupçon, les gens partent. En plus, cette fois-ci, on a fait vite : on a amputé avant la gangrène. »
Pas sûr que l'argument porte, à un mois des élections européennes qui s'annoncent comme les municipales : désastreuses pour la gauche.