L'entourage de Serge Dassault s'est refusé à tout commentaire, mais cette mise en examen du sénateur de l'Essonne n'est en rien une surprise. Elle était inéluctable. Après avoir été placé en garde à vue les 19 et 20 février dernier, l'industriel, aujourd'hui âgé de 89 ans, savait qu'à tout moment il pouvait être convoqué. Les juges d'instruction Serge Tournaire et Guillaume Daieff le soupçonnent d'avoir organisé un vaste système d'achat de voix à Corbeil-Essonnes, ville dont il fut le maire de 1995 à 2009. Ils enquêtent sur 7 millions d'euros provenant d'un compte au Liban et qui auraient pu atterrir entre les mains d'intermédiaires chargés de redistribuer cette somme dans les quartiers de Corbeil-Essonnes.
Serge Dassault conteste les accusations
Jusqu'à présent, Serge Dassault, s'il a reconnu des dons, a toujours réfuté les accusations de corruption, notamment en 2009, année où un scrutin avait été annulé par le Conseil d'Etat pour achats de votes. Dans la foulée, son bras droit, Jean-Pierre Bechter, avait été élu à la mairie. Bien qu’il soit lui aussi inculpé dans ce dossier, cela ne l'a pas empêché d'être largement réélu aux dernières élections municipales. Ce jeudi, l’avocat de Serge Dassault a contesté cette mise en examen. « Serge Dassault, innocent des faits qui lui sont ainsi injustement reprochés, ne doute pas que justice finira par lui être rendue », a déclaré Me Pierre Haïk.
Bruno Piriou, l'homme par qui le scandale est arrivé
Bruno Piriou, élu communiste et opposant politique de toujours de Serge Dassault, se réjouit pour sa part de cette mise en examen. L'homme par qui le scandale est arrivé, aujourd'hui vice-président du Conseil général de l'Essonne, est le premier à avoir dénoncé ce qu'il appelle le « système clientéliste » de l'avionneur. Un système selon lui ancien et bien ancré dans la commune. « Dès 2008, nous perdons les élections municipales de 174 voix, et il apparaît évident qu’un système de don d’argent a été effectué par Serge Dassault à Corbeil-Essonnes. Donc, je pose un recours au tribunal administratif de Versailles, qui est d’abord refusé », explique-t-il au micro de RFI.
Pendant un an, il affirme avoir « fait un travail de témoignage, de démonstration d’un système porté par Serge Dassault dans cette ville, qui me donne raison puisque le Conseil D’Etat annule les élections ». Un nouveau vote est organisé en 2009, annulé là encore par le Conseil d’Etat. Dans le même temps, « des enquêtes préliminaires sont menées, suite à des révélations de Tracfin, qui détecte des dons d’argent suspects envers des contribuables de Corbeil-Essonnes », expose Bruno Piriou. « Et suite à ces enquêtes, différents éléments sont venus conforter les policiers et les juges d’un système de don d’argent », conclut-il.