En congrès à Toulouse, le Parti socialiste à l’épreuve du pouvoir

Le congrès du Parti socialiste s'ouvre ce vendredi 26 octobre à Toulouse et se poursuivra dans une atmosphère apaisée jusqu'au dimanche 28 octobre pour introniser Harlem Désir comme nouveau premier secrétaire. Il succède à Martine Aubry avec, comme enjeu, la définition du rôle des socialistes quand ils sont au pouvoir...

C’est un congrès bien apaisé qui s'annonce. Beaucoup plus apaisé que le congrès précédent, à Reims. Il y a quatre ans, les socialistes s'étaient déchirés entre Martine Aubry et Ségolène Royal ; le parti avait failli imploser.

A Toulouse, ce sera beaucoup plus calme, puisque tout s'est joué avant. La succession de Martine Aubry s'est décidée dans les arrières-cuisines du PS au terme d'un bras de fer feutré entre la première secrétaire sortante et quelques poids lourds, la fameuse « bande des quatre », les ministres Manuel Valls, Pierre Moscovici, Vincent Peillon et Stéphane Le Foll, soucieux de contrôler leurs intérêts au sein de l’appareil.

Un premier secrétaire sous surveillance

Tous les ténors et tous les ministres socialistes du gouvernement, ont ensuite été priés de se ranger derrière la candidature de la majorité, Harlem Désir, sorti « gagnant » de sa « primaire secrète » face à Jean-Christophe Cambadélis. Et ce, au terme d’un processus finalement bien peu démocratique au regard de la primaire de l’an passé, Harlem Désir a fini par recevoir l’onction des militants : 72% des voix face au représentant de l'aile gauche du parti, Emmanuel Maurel. Un score un peu décevant pour un premier secrétaire sous surveillance. Qui tenait, dès le soir de son élection, à mettre les points sur les « i » : « Ma légitimité procède du vote des militants. Je veillerai toujours à ce qu’ils décident souverainement de l’avenir du parti socialiste. » Ca va mieux en le disant.

« Moi, président, je ne serai pas un chef de parti »

L’ancienne figure de SOS-racisme et de la génération Mitterrand dans les années 80 a perdu en charisme et gagné en langue de bois. Député européen, il devient à 53 ans le successeur lointain de François Mitterrand ou de François Hollande. Le président de la République avait d’ailleurs salué son élection d’une manière un peu étonnante, en plein Conseil européen à Bruxelles. « Harlem Désir est un vrai premier secrétaire du parti socialiste. Son score est appréciable ; il aurait fait davantage que c’eût été suspect, il aurait fait moins que c’eût été inquiétant. »

Lui, président, ne serait pas chef de parti. Mais voilà, quoiqu'il en dise, François Hollande reste très attaché à la formation qu'il a dirigé pendant onze ans. Il a suivi de près toutes les négociations et les marchandages dans la répartition des postes au sein de la direction. Certains ont même brandi des SMS du chef de l'Etat pour dire qu'ils avaient son soutien. Rien ne bien neuf en fait sous la Ve République : le président a besoin d'un parti qui le soutienne.

Un parti godillot qui marche au pas ?

Le PS est-il alors condamné à jouer les godillots, les anciennes chaussures des soldats français ? Faut-il un PS qui marche au pas ? Quel est le rôle du parti quand les socialistes sont au pouvoir ? C'est l'un des enjeux de ce congrès.

Depuis quelques mois, le parti a un peu flotté, on l'a peu entendu. « Il était aux abonnés absents », confiait cette semaine un poids lourd du gouvernement. D'abord parce que tous ses ténors sont devenus ministres. Ensuite parce qu'on était dans un entre-deux, Martine Aubry déjà parti, Harlem Désir pas encore investi.

Mais cette fois, c'est fini, assurent en choeur tous les socialistes. Et puisque les débats politiques ne peuvent pas avoir lieu au sein du gouvernement -sinon ça devient des couacs- c'est au PS que le débat doit avoir lieu. « Le gouvernement ne peut pas avoir le fonctionnement du parti, explique ainsi Marilyse Lebranchu, la ministre de la Réforme de l'Etat. Le PS doit écrire le rassemblement des socialistes autour de leur gouvernement, et préparer le programme de François Hollande en 2017. Un parti politique, c’est un lieu de débat permanent. »

« Rien sous le tapis »

Un PS, aiguillon de la majorité ? L’idée fait son chemin. Un parti en lien à la fois avec le Premier ministre et avec le Parlement. « On dit toujours que le fait d’être dans la majorité amène à une certaine indolence, avec des députés godillots, regrette le député Jean-Jacques Urvoas. Au contraire, c’est le rôle du parti socialiste de faire en sorte qu’aucun sujet ne soit abandonné. Il n’y a aucune raison de mettre sous le tapis les difficultés. »

Rien sous le tapis : sur les contrôles d'identité, le droit de vote des étrangers, ou encore la procréation médicale assistée pour les couples homosexuels, le PS, et notamment l'aile gauche du parti sortie renforcée de ce congrès, entend jouer la vigie des promesses de François Hollande, sans gêner un gouvernement déjà bien malmené. Harlem Désir a aujourd'hui tout à prouver.

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