Mediator: la difficile bataille administrative des victimes pour être indemnisées

L’affaire du Mediator revient sur le devant de la scène. Et cette fois, c’est le volet indemnisation qui provoque la colère des associations de victimes de ce médicament : sur les 580 demandes d’indemnisation examinées pour l’instant, seules 20 ont été acceptées par les experts de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM). Des chiffres pas significatifs pour l’ONIAM, qui rappelle qu’environ 7 500 demandes ont été déposées.

Le dispositif d’indemnisation des victimes du Mediator est opérationnel depuis septembre 2011. Il est géré par l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM), un organisme dépendant du ministère de la Santé. Les demandes sont examinées par un collège d’experts. Leur mission : vérifier le lien de causalité entre le Mediator et les problèmes de valves cardiaques ou d’hypertension artérielle pulmonaire des victimes présumées.

Or, la très grande majorité des demandes examinées à ce jour ont été jugées irrecevables. Un scandale pour Dominique Courtois, président de l’AVIM, l’association des victimes de l’Isoméride et du Mediator : « Pendant des mois, nous avons participé au comité de suivi des victimes du Mediator en présence du ministre de la Santé de l’époque. Nous avons mis en place les critères de ce fonds d’indemnisation, en particulier les documents à fournir. Et maintenant, nous sommes face à un collège d’experts qui demande beaucoup plus de pièces », s’insurge-t-il.

« Il faut notamment que vous apportiez la preuve qu’au moment où on vous a prescrit le Mediator, vous étiez en parfait état cardiovasculaire. Impossible, si par exemple vous avez commencé à prendre du Mediator il y a vingt ans », déplore-t-il.

Un lien « direct et causal »

L’ONIAM, de son côté, invoque l’intérêt des patients et la législation sur le sujet : « Ces pièces complémentaires sont demandées dans le but de démontrer un lien de causalité entre le préjudice et l’administration de benfluorex [principe actif du Mediator, ndlr] », précise Erik Rance, directeur de l’ONIAM.

Les refus déjà signifiés concerneraient principalement des valvulopathies mineures, assez fréquentes chez les personnes âgées. Motif : la difficulté pour établir un lien « direct et causal » avec la prise de Mediator, a expliqué à l’AFP la pneumologue Irène Frachon, qui fut l’une des premières à lancer l’alerte sur les dangers du médicament. « On ne peut pas prouver à 100%, mais il faut que le doute bénéficie à la victime, alors qu’il bénéficie actuellement à Servier [du nom du laboratoire qui fabriquait le Mediator, ndlr] », a-t-elle ajouté, en soulignant notamment le « préjudice d’angoisse » et « le caractère symbolique de la réparation ».

Une seule victime indemnisée

La vingtaine de dossiers validés ont, quant à eux, été transmis aux laboratoires Servier, car ce sont eux qui doivent payer in fine. A ce jour, une seule victime a été indemnisée de la sorte. D’autres devraient suivre, a indiqué l’entreprise.

En cas de refus des laboratoires Servier (par exemple parce qu’ils contestent l’avis définitif du collège d’experts), l’ONIAM peut avancer les fonds à la victime et traduire en justice l’entreprise pour réclamer le remboursement et une pénalité.

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