Le sentiment est partagé par l'ensemble des syndicats de police. Derrière la fronde, il existe un profond malaise chez les hommes en uniforme.Tous sont d'accord pour dire que l'exercice du métier est encore plus difficile dans les zones dites sensibles où « le moins que l'on puisse dire c'est que la police n'est pas la bienvenue, il y a une véritable hostilité de la part de la population » souligne Patrice Ribeiro, secrétaire général du syndaicat Synergie officiers.
Les conditions de travail se sont dégradées dans la police à cause de la révision des politiques publiques. Patrice Ribeiro ajoute : « si en plus nous ne sommes pas soutenus par la justice, nous avons un sentiment d'abandon, de rejet et de stigmatisation. »
Roulette russe
Ces rapports conflictuels avec la justice s'illustrent, par exemple, avec l'usage des armes à feu. «Nos collègues hésitent à sortir leur arme parce qu'à chaque fois c'est la roulette russe, tout dépend du magistrat sur lequel vous tombez, soit on va vous féliciter, soit on va vous mettre en prison », ironise le syndicaliste Patrice Ribeiro.
Les policiers dénoncent des règles trop floues et donnent l'exemple d'un de leurs collègues mort à Chambéry début avril parce ce qu'il n'a pas sorti son arme : «mais s'il avait sorti son arme et abattu les conducteurs du véhicule qui lui fonçaient dessus, il aurait été mis en examen. » La profession pense que l'usage des armes doit être encadré mais que la loi n'est plus adaptée car les policiers sont aujourd'hui face à des gens armés et déterminés.
Le manque d'effectifs et de moyens
Ce n'est pas la revendication que les policiers souhaitent mettre en avant aujourd'hui, car il souhaitaient surtout insister sur la baisse des effectifs : « l'exigence de résultats est là mais on recrute moins, on ne remplace pas les départs en retraite » rappelle Jean-Marc Bailleul, le secrétaire général du SNOP, le syndicat national des officiers de police.
Patrice Ribeiro a un avis plus nuancé :« ce n'est pas la peine d'embaucher des policiers supplémentaires si c'est pour leur proposer un travail de maître-chien ou de garde-chiourme avec des détenus hospitalisés, ce qu'il faut faire, c'est recentrer les policiers sur leur cœur de métier. »
La politique du chiffre
Les policiers pensent qu'il est normal de demander une exigence de résultats : « le grand malheur c'est que nous sommes dans une activité qui se chiffre et se qualifie, la gauche et la droite ont toujours plaidé pour cette politique du chiffre car les politiques veulent des résultats et veulent communiquer sur ces résultats ».
Mais pour les syndicats de police, le vrai problème est ailleurs : « on a une hiérarchie dans la police qui est payée en fonction des résultats qu'elle obtient ; de ce fait, cela crée une déviance qui fait que les chefs de police et en particulier les commissaires, vont mettre de la pression sur leurs hommes pour obtenir des primes plus abondantes », conclut Patrice Ribeiro.