Pari gagné pour François Hollande. Une heure et demie de discours devant près de 20 000 personnes, galvanisées. Un discours très à gauche avec un seul ennemi : « mon véritable adversaire, il n’a pas de nom, pas de visage, pas de parti. Il ne présentera jamais sa candidature et pourtant il gouverne. Cet adversaire, c’est le monde de la finance ». Des propos qui rappellent ceux de François Mitterrand, qui, lors du Congrès d’unification des socialistes à Epinay en juin 1971, avait prôné la rupture avec « toutes les puissances de l’argent, l’argent qui corrompt, l’argent qui achète, l’argent qui écrase, l’argent qui tue, l’argent qui ruine, l’argent qui pourrit jusqu’à la conscience des hommes ». Dans la « République irréprochable » qu’il appelle de ses vœux, François Hollande souhaite inscrire dans la Constitution la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l’Etat, et réduire de 30% les indemnités du président et des ministres.
Lors de ce discours où il s’est quelque peu dévoilé, il a parlé de ses parents mais aussi de lui « j’aime les gens, quand d’autres sont fascinés par l’argent », l’un des tacles à Nicolas Sarkozy, pourtant jamais cité dans son discours. Le candidat à la présidentielle a également rendu hommage à la Corrèze, département dont il est élu.
Le candidat socialiste ne s’est pas contenté d’égrainer des généralités sur la « promesse républicaine », il a contre toute attente exposé quelques propositions pour donner de la substance au « rêve français ». Outre des mesures déjà connues comme la création d’une banque d’investissement ou les contrats de génération, le favori des sondages a présenté d’autres propositions sur l’éducation, la santé, le logement, la sécurité, la fiscalité et la finance et sur des réformes de société. Il détaillera ses propositions et présentera sa plate-forme présidentielle ce jeudi lors d’une conférence de presse avant de participer à une émission télévisée le soir même et où il débattra avec Alain Juppé, le ministre des Affaires étrangères.
Des réactions convenues
Pour Manuel Valls, directeur de la communication de sa campagne, François Hollande, a prononcé un « discours à la Nation ». « Le candidat a raconté une histoire », le fameux storytelling. Quant à Michel Sapin, plus lyrique, il a « trouvé très beau, cette capacité à donner de l’élan. C’était un discours sur la France ». Beaucoup moins de louanges du côté du Parti communiste. Pierre Laurent, le secrétaire national du PCF dénonce un manque de « clarté ». « Sur la finance, on n’entend toujours pas de mesures, il y a beaucoup de choses loin du compte ».
Sans surprises, vives salves du côté de la majorité. Henri Guaino juge le discours de François Hollande « manichéen, le bien contre le mal, la droite contre la gauche et où la crise est absente ». Et le conseiller spécial de rajouter : « un président, pour moi, ce n’est pas quelqu’un qui fait gagner son parti, c’est quelqu’un qui fait gagner la France ». Jean-François Copé a ironisé sur le « grand numéro de démagogie » du candidat socialiste. Et le secrétaire général de l’UMP de poursuivre : « le candidat socialiste à la présidentielle est fidèle à son image : habile pour flatter un public de gauche, mais ce n’est certainement pas le discours d’un homme courageux. A aucun moment ne lui est venue l’idée de proposer une de ces réformes vitales pour le pays, au risque d’être impopulaire ».
Marine Le Pen, la candidate du Front National à la présidentielle, s'est étonnée que François Hollande voie la finance comme son « véritable adversaire » à la présidentielle, invitant les Français à « regarder un peu dans leur rétroviseur » sur les positions passées du candidat socialiste.