En France, lorsque l’on entre sur le territoire en tant qu’étudiant étranger non ressortissant de l'Union européenne, il n’est permis de travailler qu’à titre « accessoire ». Ce qui signifie pour une durée annuelle de 964 heures, soit 60% d’un temps plein. A l’issue du cursus d'étude, cette condition reste valable mais l'étudiant doit faire une demande « d’autorisation provisoire de séjour (APS) de 6 mois, non renouvelable ». A cela s’ajoute une autre obligation. Au-delà du quota horaire de 964 heures de travail, l’étudiant doit procéder à un « CDS, un changement de statut dans les 15 jours de la signature de son contrat de travail. » Et c’est bien cela qui pose problème car un changement de statut n’est pas simple à obtenir. Les critères sont très stricts. Si un employeur veut embaucher un diplômé étranger, ce changement est obligatoire ainsi qu'une déclaration nominative auprès de la préfecture.
Même si toute la procédure est suivie à la lettre, rien ne garantit la validation de la demande. Chaque année, des centaines d’étudiants se voient refuser l’obtention de la carte de séjour « salarié ». Le Collectif 31 mai en est la représentation. Il réunit des étudiants étrangers diplômés, des référents d’universités et des associations de défense des droits des étrangers. Il a été créé en réaction à la « circulaire du 31 mai » signé par Claude Guéant, le ministre de l'Intérieur et Xavier Bertrand, le ministre du Travail. Cette circulaire impose aux préfectures« la diminution des flux » d’entrée des étudiants étrangers, avec notamment un « contrôle approfondi » des demandes d'autorisation de travail. Le collectif veut mettre fin à cette circulaire, obtenir des récépissés pour les personnes en situation d’urgence, dénoncer les conditions de dépôts des dossiers dans les préfectures ainsi que le délai d’attente trop long (jusqu'à cinq mois).
Depuis la mise en application de cette « circulaire du 31 mai » de nombreux étudiants étrangers se sont vus refuser la possibilité de rester travailler en France. Certains étaient pourtant très qualifiés. D’après l’OFII, l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration, en 2010, le flux d’étudiants étrangers, en France, représente 65 mille 800 étudiants.
Seulement 284 659 étudiants sont entrés dans l’enseignement supérieur. Seul les étudiants les plus qualifiés (minimum niveau master) peuvent prétendre intégrer une entreprise française à la fin de leurs études.
Passer la souris sur les graphiques pour voir les détails (source : ministère de l'Enseignement supérieur, chiffres en milliers et %, année 2010-2011)
Ces chiffres pourraient rassurer. Mais, chaque année, en moyenne, seulement 6 000 étudiants obtiennent l’autorisation de travailler en France. Fatma Chouaieb, la créatrice du Collectif 31 mai affirme qu'il y a beaucoup plus de demandeurs : « depuis quinze jours, nous recevons 15 % de réclamations supplémentaires par jour, soit environ 30 cas d’étudiants étrangers de plus, par jour, qui demandent notre aide. Leur dossier a été refusé ou mis en attente. » Le site internet de l'association permet aux étudiants de se signaler grâce à un formulaire mis en ligne. « Le recensement commence tout juste. »
Le collectif a transmis 200 dossiers au ministre de l’Enseignement supérieur Laurent Wauqiez : « ces dossiers sont ceux d’étudiants diplômés, qui ont une promesse d’embauche mais ne peuvent pas travailler », déclare Fatma Chouaieb. Rachid (nom d'emprunt) est dans ce cas. A 24 ans, ce Maghrébin est diplômé d'une grande école de commerce parisienne. Cependant, il ne peut exercer son métier de conseiller : « je me suis senti vraiment rejeté alors que cela fait six ans que je vis en France et que je me sens bien intégré ». Le Collectif 31 mai affirme qu’une vingtaine d’étudiants sont en situation d’urgence. Ils ont reçu une obligation de quitter le territoire.
Ce mardi 11 octobre, le ministre de l'Enseignement supérieur, Laurent Wauquiez a réaffirmé sa volonté de « corriger » la « circulaire du 31 mai ». A l’issue d’une réunion avec les représentants des universités et des grandes écoles, il a assuré qu’une directive la rendra moins restrictive. Le ministre a aussi signalé que 5 600 autorisations de travail ont été accordées à des diplômés étrangers entre le 1er janvier et le 1er septembre 2011, contre 4 200 pendant la même période en 2010. Mais, il a refusé de préciser le nombre de demandes déposées dans les préfectures.
Quoi qu’il en soit, à l’issue de cette réunion, les représentants de la Conférence des présidents d’universités (CPU) et de la Conférence des grandes écoles (CGE) semblaient plus confiants. Selon eux, la situation devrait être améliorée rapidement, au moins pour les cas les plus difficiles.