La grande histoire des jouets au Grand Palais

Quel est votre jouet préféré ? Une grande exposition totalement inédite sur l’histoire du jouet nous présente un millier de jouets de toutes les époques, de l’Antiquité jusqu’à aujourd’hui. Des jouets et des hommes ouvre ce 14 septembre et réunit des raretés et des objets exceptionnels. Après les peintures de Picasso et Monet, assisterons-nous à un engouement pour les jouets au Grand Palais ?

C’est un impressionnant Automate du Père Noël en avion qui nous propulse en premier dans l’univers des jouets au Grand Palais. « C’est un automate qui a été électrifié, explique Dorothée Charles, la commissaire de l’exposition. Il a été le premier objet animé des vitrines de Noël au magasin du Bazar de l’Hôtel de Ville à Paris en 1925. »

L’envie de jouer et d’avoir un jouet existe probablement depuis la naissance d’un enfant. Vous subissez de plein fouet 'la folie Beyblade metal fusion' de votre fils ? Les premières toupies datent d’il y a quatre

ou cinq mille ans. Les plus anciens jouets qui se retrouvent dans l’exposition sont un petit hérisson, un buffle et un bélier, tous en terre cuite et sur roulettes. Des petits joujoux fabriqués en 1000 ans av. J.C. et qui ne se distinguent presque pas des jouets trois mille ans plus tard. « Dans l’exposition, ces animaux se retrouvent à côté d’une vachette des années 1950 en plastique, fabriquée par un fabricant français. Là, on montre une permanence du jouet, de l’Antiquité jusqu’à aujourd’hui. Il a peu changé dans sa forme. C’est toujours un objet qu’on tire, qui a quatre roulettes et l’enfant va l’animer en tirant une ficelle ou un petit ruban. »

Exemplaires uniques et produits en série

Les plus grands musées de jouets en Europe et aux Etats-Unis ont prêté leurs pièces maîtresses : il y a une poupée articulée italienne du 3e siècle ; une véritable voiture chinoise pour enfant de 1860, l’ours peluche allemand de 1905, le précurseur du Teddy bear ; Napoléon à cheval de 1920 ou Buzz l’Eclair, né en 2003, un astronaute à piles, haut de 30 cm. A partir de quel moment un jouet se transforme en œuvre d’art digne d’être exposé au Grand Palais ? « On s’est centré sur les jouets occidentaux, fabriqués en exemplaire unique ou produits en série. On a écarté toute cette histoire très intéressante du jouet auto-produit qui va jusqu’à l’art brut. Donc, on se retrouve avec l’ensemble des jouets que des milliers de personnes ont eu dans leur chambre, mais également avec des jouets d’artistes, comme Benjamin Rabier qui a créé en 1921 la Vache qui rit, mais aussi des jouets d’Alexander Calder (1927) ou de Chloé Ruchon qui a inventé un Barbie foot (2009). »
 
L'Aston Martin DB5

Dans l’Egypte ancienne, les filles avaient des poupées sous forme de figurines. L’incarnation de leur futur statut de femme. Et c’est au 18e siècle qu’apparaît la cuisine de poupée, très prisée jusqu’à aujourd’hui et dont le jeu de simulation Sims 2 (2008) est une sorte de prolongation virtuelle. L’exposition soulève maintes questions cruciales de notre socialisation. Les poupées pour filles, les voitures et les trains pour garçons, sont-ils une invention sociale qui détermine les besoins des enfants ? Où est-ce l’envers ? En 1966, prince Andrew avait vu Goldfinger et voulait absolument jouer au James Bond. Le prince avait droit à un modèle unique au monde, une réplique exacte de l’Aston Martin DB5 qui pouvait accélérer jusqu’à 16 km/heure et qu’on peut également admirer au Grand Palais.

Jouets de guerre pour le plaisir

Pendant les temps de guerre, les jouets ont souvent marché à pas avec l’idéologie dominante : il y a Napoléon combattant la Russie, des figurines « Elastolin » d’Hitler à la tribune, Mussolini en fil de fer, des G.I. en tenue en combat. Des jouets de guerre nuisent-ils aux enfants ? Dans les années 1960, Umberto Eco avait écrit une Lettre à mon fils où il exprime son espoir qu'en jouant à la guerre, son fils puisse expulser pendant leur enfance ses pulsions destructrices.

Aujourd’hui, face aux jeux vidéo, est-ce que les jouets font encore le poids ? « Il y a de plus en plus de jouets, remarque la commissaire Dorothée Charles. Un enfant a aujourd’hui plus de 300 jouets dans sa petite enfance ! Donc, par rapport à l’histoire plus récente de l’image animée et du jeu vidéo, il semblerait que l’enfant a un besoin très important de se projeter et de jouer avec des objets. Et non pas uniquement des images animées. »
 

Se séparer ou collectionner

Les enfants qui veulent entrer dans le monde des grandes personnes, doivent accepter de se séparer de leurs jouets, apprend-on dans l’exposition. Dans l’Antiquité grecque, les petites filles sacrifiaient leurs poupées en les déposant au pied de l’autel d’Artémis. Aujourd’hui, c’est plutôt aux enchères en ligne ou à la kermesse de l’école. Et il y a une autre solution : devenir collectionneur. En France, leur nombre a doublé les derniers dix ans; il y en aurait actuellement 200 000.

Les enfants continueront de fabriquer leur propre imaginaire et d’inventer leurs propres histoires. Et même quand les mille jouets au Grand Palais semblent être sages comme des images derrière leur vitrine, des films comme La révolution des jouets (1947) ou Toy Story  (1996) rappellent que les jouets aussi peuvent se révolter.

Des jouets et des hommes, du 14 septembre jusqu'au 23 janvier au Grand Palais à Paris.

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