Affaire Tapie : la décision sur Christine Lagarde reportée au 4 août

La décision, très attendue, devait être connue ce vendredi 8 juillet. Elle a été reportée au vendredi au 4 août, un magistrat s’étant récusé. La Cour de justice de la République (CJR) doit statuer sur l'éventuelle ouverture d'une enquête visant la toute nouvelle directrice générale du FMI, Christine Lagarde, pour son rôle dans une affaire liée au sulfureux homme d'affaires Bernard Tapie.

A peine entrée en fonction, la directrice générale du Fonds monétaire international, Christine Lagarde, devait être fixée ce vendredi. Elle devra finalement attendre encore un mois avant de savoir si elle fera, ou non, l'objet d'une enquête pour son rôle dans l'affaire Tapie. La Cour de justice de la République (CJR) a en effet décidé de reporter sa décision au 4 août.

Vendredi 8 juillet dans la matinée, le président de la commission des requêtes, Gérard Palisse, a indiqué qu'un membre de la commission des requêtes avait « fait connaître tardivement qu'il était dans l'obligation de se récuser ». Il s'agit de la magistrate à la Cour des comptes Laurence Fradin, épouse de l’ancien ministre socialiste de l’Intérieur et de la Défense Pierre Joxe. Laurence Fradin aurait préféré se récuser car elle a eu à connaître du dossier Tapie à la Cour des comptes.

Ce désistement tardif est surprenant car la commission des requêtes est saisie de ce dossier depuis deux mois. Quant au « membre suppléant qui aurait pu le substituer », selon M. Palisse, il s'est dit « dans l'impossibilité de le remplacer immédiatement sans connaissance du dossier. La commission a donc décidé de renvoyer l'examen de cette affaire au jeudi 4 août ».

45 millions d'euros à Bernard Tapie au seul titre du « préjudice moral »

Le 10 mai dernier, le procureur général près la Cour de cassation, Jean-Louis Nadal, avait saisi la commission des requêtes de la CJR. Le magistrat considérait qu'il existait des éléments susceptibles de caractériser un « abus d'autorité » de l'ancienne ministre française de l'Economie dans un arbitrage rendu en juillet 2008, favorable à Bernard Tapie dans son long conflit avec le Crédit Lyonnais.

Le litige date de la revente de l'équipementier sportif Adidas en 1993. Bernard Tapie affirme avoir été floué par le Crédit Lyonnais, à l’époque banque publique.

Alors qu'au début de l'affaire, Bernard Tapie assurait qu'il ne toucherait « à la louche » que 20 à 25 millions d'euros, cet arbitrage a débouché sur l'attribution de 285 millions d'euros à l'homme d'affaires.

Le parquet général reproche à Mme Lagarde d'avoir recouru à un arbitrage, une procédure privée, alors qu'il s'agissait de deniers publics, d'avoir eu connaissance de l'éventuelle partialité de certains juges-arbitres et de ne pas avoir exercé de recours contre la sentence, alors que plusieurs spécialistes l'y encourageaient. Les conditions dans lesquelles la convention d'arbitrage a été modifiée pour permettre l'attribution de 45 millions d'euros à Bernard Tapie au seul titre du « préjudice moral » sont aussi mises en cause.

Christine Lagarde nie toute infraction. Mercredi sur France 24, la patronne du FMI se montrait confiante : « Que la commission des requêtes décide ou non de poursuivre ou non les investigations, j'ai exactement la même confiance et la même sérénité ».

S'il y a enquête, elle sera longue

Trois options sont envisageables le 4 août : la commission classe sans suite ; elle demande des documents supplémentaires ; elle rend un « avis favorable » à une enquête. Le procureur général près la Cour de cassation serait alors tenu de saisir la commission d'instruction.

Seulement, Jean-Louis Nadal est parti en retraite le 30 juin et n'a pas été remplacé, un intérim susceptible d'offrir encore un répit à Mme Lagarde. Vendredi, la Chancellerie a proposé le nom de Jean-Claude Marin, actuel procureur de Paris, pour lui succéder. Le Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) pourrait rendre sa décision sur cette proposition le 19 juillet. Une enquête de la commission d'instruction pourrait aboutir au renvoi de la patronne du FMI devant la CJR, chargée de juger les crimes et délits commis par les membres du gouvernement « dans l'exercice de leurs fonctions ».

S'il y a enquête, elle sera longue et, le cas échéant, Christine Lagarde ne serait pas jugée avant plusieurs années. Depuis sa création en 1993, la CJR a examiné plus d'un millier de plaintes et jugé six ministres.

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