Le Front national tente d’investir les syndicats

Un mois après sa suspension, Fabien Engelmann, le militant CGT, candidat Front national (FN) aux cantonales en Moselle, a été convoqué, lundi 28 mars 2011 au siège de Montreuil, pour être entendu par les instances cégétistes. D’autres candidats FN, syndicalistes également, sont en conflit avec leur fédération.

Plusieurs centaines de personnes ont réservé, ce lundi, une bronca à Fabien Engelmann, dirigeant CGT des employés communaux de la mairie de Nilvange, à son arrivée au siège de la fédération. Candidat FN aux cantonales en Moselle, le syndicaliste, ancien militant du NPA d’Olivier Besancenot, a été entendu par le secrétaire général de la Fédération CGT des services publics Baptiste Talbot, avant la réunion du Conseil national, qui devra statuer sur son cas.

La décision d’exclusion définitive qui doit être prise le 6 avril prochain ne fait plus aucun doute désormais. Pour la CGT, il y a, en effet, incompatibilité entre ses convictions politiques et son engagement syndical. « La CGT défend tous les travailleurs quelle que soit leur nationalité. On ne peut pas accepter des gens qui défendent les patrons et la préférence nationale. On ne peut accepter un parti qui prône ouvertement la haine raciste », explique Geneviève, militante CGT de l'union locale Bagnolet-Les lilas présente devant le siège de Montreuil.

Multiplication de candidats FN, syndicalistes

Pour sa part, le FN a cherché à instrumentaliser cette affaire, encourageant Fabien Engelmann à porter plainte contre la CGT pour « discrimination politique ». Cette tentative de contre-offensive s’inscrit, selon l’avocat de Fabien Engelmann, Maître Gilbert Collard, dans la stratégie de la nouvelle présidente du FN Marine Le Pen, de reconquête de l’électorat populaire.

Ce n’est pas la seule affaire de ce genre. D’autres candidats FN, également syndicalistes, ont des problèmes avec leur fédération. Un militant CFDT, également en Moselle (canton de Boulay), et un militant SUD de la mairie de Toulouse (canton de Haute-Garonne), ont également été suspendus de leur mandat et pourraient être exclus, pour s’être présentés comme candidat du FN aux élections cantonales. Une déléguée régionale FO du Nord-Pas-de-Calais pour le personnel civil des armées, a également perdu son mandat syndical pour des raisons similaires.

Appel à la vigilance

L’affaire est prise très au sérieux par les différentes organisations syndicales nationales CFDT, CGT, FSU, Solidaires et Unsa qui, dans une déclaration commune, se sont déclarées « déterminées à empêcher l'instrumentalisation du syndicalisme par le Front national, qui n'est pas un parti comme les autres et dont les orientations sont à l'opposé des valeurs qu'elles portent ». Pour sa part, le secrétaire de la CGT Bernard Thibault a envoyé à tous les secrétaires généraux de syndicats CGT un courrier où il dénonce « l’entrisme » du FN et appelle chacun à « une grande vigilance ». Et Bernard Thibault de rappeler « les tentatives du FN de créer dans les années 90, des pseudo-syndicats : FN police et FN RATP ». Pour sa part, Luc Bérille, secrétaire de l’Unsa, souligne le danger politique quand il y a « alimentation de la souffrance sociale ».

Alors que le FN lance un « Cercle National de Défense des Travailleurs syndiqués », un sondage Harris Interactive commandée par le mensuel Liaisons sociales, conclut que le discours du FN auprès des électeurs se disant « proches des syndicats » reste contenu. Seulement 9% de ces derniers indiquent avoir voté, aux élections cantonales, pour un candidat du Front national contre 15% de l’ensemble des votants. Il y a de fortes disparités selon les syndicats : parmi les sympathisants de la CGT, ils ne sont que 3% à avoir voté pour le parti de Marine Le Pen contre 15% pour les proches de Force Ouvrière.

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