Avant de s’attaquer à la réforme du système monétaire international, au renforcement de la régulation de la finance mondiale ou encore à la lutte contre la spéculation sur les matières premières –autant de thèmes que la France a érigés en priorité de sa présidence du G20– Paris va d’abord tenter de s’attaquer aux divergences qui existent sur la mesure des grands déséquilibres économiques de la planète. « La Chine économise et exporte, l'Europe consomme, les Etats-Unis empruntent et consomment. Est-ce que ce modèle est bien équilibré ? Probablement pas », a résumé il y a quelques jours Christine Lagarde, la ministre française des Finances.
L’objectif de ce G20 Finances, qui se réunit pour la première fois sous présidence française, est de parvenir à un diagnostic partagé sur l'état du monde et de déterminer une liste d'indicateurs communs pour en mesurer les déséquilibres. Cette liste reviendrait, en quelque sorte, à noter les «bons» et les «mauvais» élèves sur des critères comme le commerce extérieur, la dette publique ou encore les déséquilibres des balances courantes. D’autres pistes sont également évoqués comme les taux de change réels, les taux d’épargne privée ou encore les réserves de change. Une fois ces indicateurs de performance déterminés, un système d’alerte pourra être mis en place par le Fonds monétaire international (FMI) qui pourra ensuite adresser ses recommandations en matière de politique économique.
Contre-sommet des émergents avant le G20 Finances
Mais cette démarche est loin de faire l’unanimité. D’abord obtenir un consensus sur ces fameux indicateurs de mesure des déséquilibres est loin d’être acquis tant les positions au sein même du G20 sont divergentes. La Chine, par exemple, renâcle à voir privilégier le critère de l’excédent de la balance commerciale qui la désavantagerait car il prendrait en compte les intérêts de ses phénoménales réserves de changes, les plus importantes au monde avec près de 3000 milliards de dollars. Elle est soutenue par les autres grands pays émergents comme l’Inde, la Russie et le Brésil. Un contre-sommet réunissant ces pays doit se tenir en début d’après-midi à Paris, avant l’ouverture du G20.
Autre point d’achoppement, la définition de références chiffrées pour accompagner ces indicateurs. La proposition américaine portée à l’automne dernier par le secrétaire au trésor Timothy Geithner de limiter à 4% du PIB les excédents ou les déficits courants, avait provoqué une levée de bouclier. Et les positions n’ont pas évolué depuis. L’Allemagne a encore fait savoir, la veille de la réunion de Paris, qu’elle refusait que le G20 impose des objectifs quantitatifs.
Les débats promettent donc d'être houleux. Car même si les ministres des Finances et les banquiers centraux des pays du G20 parviennent à un accord préliminaire sur cette question fondamentale de la mesure des déséquilibres, il restera encore beaucoup à faire avant la mise en place par le FMI d’un système d’alerte pouvant à plus long terme conduire à des recommandations en matière de politiques économiques. Une fois toutes ces contraintes levées, rien n’indique enfin que les pays fautifs soient prêts à se laisser dicter leur conduite.