Augmenter le niveau de pression sur la Russie, tout en laissant la porte ouverte à la désescalade si la Russie permet l’envoi d’observateurs internationaux en Crimée, et s’assoit à la table des négociations. C’est manifestement la stratégie de la Maison Blanche, analyse Anne-Marie Capomaccio, la correspondante de RFI à Washington.
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Barack Obama et Vladimir Poutine ont eu une heure d’entretien téléphonique hier soir. On ne sait pas si le président russe a été sensible aux arguments de la Maison Blanche. Seulement qu'il a rappelé au président américain l'importance des relations américano-russes qui « ne devraient pas être sacrifiées par des problèmes internationaux isolés, bien qu'extrêmement importants ».
En attendant, de nouvelles sanctions ont été annoncées : gel des avoirs russes pour les
entités impliquées dans la crise ukrainienne et restriction de visas. Sur le plan militaire, un destroyer lance-missiles vogue vers la mer Noire pour se positionner à portée de la Crimée et des avions F16 et 300 hommes arriveront en Pologne dans les jours qui viennent. Il faut aussi s’attendre à ce que la pression sur la Russie s’accentue encore car l’équipe Obama le répète à l’envi, d’autres sanctions sont à l’étude.
Des sanctions qui ne font ni chaud ni froid aux Russes ?
Mais les sanctions prises pour l'instant n'émeuvent pas outre mesure les Russes, note Muriel Pomponne, notre correspondante à Moscou. Pour ce qui est des restrictions de visas imposées par les Américains à certaines personnalités russes, on ne sait pas lesquelles, mais en tout cas le président Poutine n’est pas concerné et c’est l’essentiel. Concernant la suspension des discussions sur la simplification des visas entre l'Europe et la Russie, de toute façon ces négociations sont infructueuses depuis des années.
Plus gênant : la décision de Washington de suspendre sa coopération militaire avec Moscou, puis celle de l'Otan de cesser certaines actions communes avec la Russie, ont valu une réponse assez cinglante de la diplomatie russe qui a évoqué « une mentalité de Guerre froide ». « On ne peut pas travailler sous la menace d'ultimatum », a déclaré Sergueï Lavrov, tandis qu'un autre diplomate ajoutait : « Des sanctions reviendraient comme des boomerangs sur ceux qui les décident ».
Car, même si ce n'est pas dit, les sanctions économiques sont redoutées. Cette perspective a encore fait chuter le rouble hier, jeudi. Alors les députés russes brandissent la menace d'une saisie des actifs des sociétés européennes et américaines. Ils sont en train d'étudier la légalité d'une telle mesure.
Soutien unanime à la politique d'Obama
En tout cas, Barack Obama bénéficie d’un consensus parlementaire qui lui permet d’agir plus librement. La chambre des représentants, à majorité républicaine, a en effet voté hier, à la quasi unanimité, une loi qui autorise les Etats-Unis à garantir les prêts consentis à l’Ukraine à hauteur d’un milliards de dollars, rapporte notre correspondante à Washington, Anne-Marie Capomaccio. Le texte sera voté par le Sénat, acquis aux démocrates, sans difficulté la semaine prochaine. Cela signifie que les critiques des premiers jours se sont tues. Les républicains demandaient des mesures immédiates contre Moscou, craignant un manque de fermeté de Barack Obama. Les sanctions annoncées par le président les ont rassurés, et c’est assez rare pour être remarqué. Toute la classe politique américaine soutient, pour l’instant, la stratégie adoptée par la Maison Blanche sur la crise ukrainienne.
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