Les antennes de RFI consacrent une édition spéciale à la situation en Ukraine, ce lundi 24 février 2014 entre 6h et 7h TU (une heure de moins qu'à Paris)
Avec notre envoyée spéciale à Kiev, Anastasia Becchio
On peut dire que la carrière d'Oleksandre Tourtchinov est depuis longtemps liée à celle de Ioulia Timochenko. Il avait été son vice-Premier ministre jusqu’en 2010, lorsqu’elle était à la tête du gouvernement.
Oleksandre Tourtchinov a donné aux députés jusqu'à mardi pour former une nouvelle majorité et un gouvernement d'unité nationale. Les noms des candidats potentiels au poste de Premier ministre circulent déjà : Arseni Iatseniouk, l’un des trois chefs de file de la contestation, Petro Porochenko, député sans étiquette et oligarque. Autre candidate : Ioulia Timochenko, mais l'ancienne prisonnière et opposante à Victor Ianoukovitch a d'ores et déjà fait savoir qu'elle refusait le poste.
Où se trouve Viktor Ianoukovitch ?
Le président déchu est toujours introuvable. Il aurait essayé de fuir en Russie sans succès. Sur la place de l'Indépendance, les informations le concernant sont suivies avec grande attention. Natalya est une enseignante venue de Lviv et, pour elle, tant que Ianoukovitch n'est pas retrouvé, il n'est pas question de baisser la garde : « Il n’a pas encore été enfermé à double tour dans une cage. C’est un animal qui est très ingénieux, lance-t-elle. C’est un profil d’homme qui a une mentalité de criminel, qui s’est construit en prison, qui a engrangé une fortune en commettant des crimes, qui est arrivé au pouvoir de la même façon, et qui n’a pas arrêté d’agir en toute impunité. » Viktor Ianoukovitch n'a pas fait d'autres déclarations depuis son interview télévisée de samedi dans laquelle il qualifiait les événements de Kiev de « coup d'Etat ». Mais il est de plus en plus isolé, lâché par un grand nombre des dirigeants de son Parti des régions.
Des mandats d'arrêt ont par ailleurs été lancés contre des personnages clés de son système, l'ancien ministre des Revenus Oleksander Klimenko et l'ex-procureur général Viktor Pchonka afin qu'ils soient traduits devant la justice. Ces annonces ont été accueillies par des applaudissements par la foule immense rassemblée en ce dimanche sur la place de l'Indépendance.
Autre décision, plus anecdotique, mais très symbolique de la fin de l'époque Ianoukovitch : les députés ont voté la saisie et la nationalisation de sa luxueuse résidence en banlieue de Kiev, ouverte au public depuis samedi. Des militants affirment y avoir mis au jour des documents détaillant un système de pots-de-vin organisé à très grande échelle.
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« Préserver l'intégrité territoriale de l'Ukraine »
La France, par la voix du ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, se dit prête à soutenir les Ukrainiens dans le processus de transition politique : « La situation en Ukraine est évidemment radicalement nouvelle. Le président Ianoukovitch est parti. Dans ces circonstances, quelle doit être l’attitude de l’Europe et de la France ? Accompagner cette transition démocratique, souhaiter qu’elle soit pacifique et que l’intégrité et l’unité de l’Ukraine soient respectées. »
François Hollande, qui s'est entretenu dimanche avec la chancelière allemande Angela Merkel de la situation en Ukraine, a salué « la transition démocratique qui s’engage en Ukraine » et souligné à son tour que « l'unité et l'intégrité territoriale du pays doivent être respectées ». Autrement dit, éviter notamment que les régions de l'Est, russophone et russophiles, soient tentées par le séparatisme. Même inquiétude des Etats-Unis. Une partition de l'Ukraine n'est dans l'intérêt de personne. Voilà ce que répète aujourd'hui Susan Rice, une proche conseillère de Barack Obama.
La diplomatie allemande au chevet de l'Ukraine
Avec notre correspondante à Berlin, Nathalie Versieux
La diplomatie allemande joue traditionnellement un rôle prépondérant dans la région. Les intérêts de l'Allemagne sont à la fois historiques, stratégiques et économiques, tant vis-à-vis de la Russie que de l'Ukraine. Depuis des mois, les opposants à Poutine et à Ianoukovitch défilent à Berlin, qui suit avec inquiétude le déroulement des événements à Kiev.
Angela Merkel craint pour l'unité du pays. Dans la journée, la chancelière a tout d'abord appelé Ioulia Timochenko, l'enjoignant à tout faire pour éviter une partition de l'Ukraine. Elle doit faire un pas en direction des Ukrainiens de l'Est, traditionnellement pro-Russes, a insisté le porte-parole du gouvernement allemand.
La chancelière a ensuite appelé Vladimir Poutine. Tous deux sont d'accord sur le fait que l'Ukraine doit se doter rapidement d'un gouvernement en mesure d'agir et que l'intégrité territoriale doit être préservée, a insisté la chancellerie dans un communiqué.
Le ministre social-démocrate des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, favorable à un ton plus modéré envers la Russie de Poutine, a joué un rôle de premier plan dans le dénouement de la crise qui a secoué le pays pendant trois mois.
La Russie a décidé de rappeler à Moscou son ambassadeur en Ukraine, Mikhaïl Zourabov, pour des consultations.