Autriche: 5000 manifestants pour la prestation de serment du gouvernement

Plus de 5000 manifestants, selon police, se sont rassemblées en fin de matinée aux abords du palais présidentiel à Vienne. C'est là que le nouveau gouvernement a été investi. Sebastian Kurz, le leader conservateur âgé de 31 ans, est officiellement chancelier, Heinz-Christian Strache, leader du parti d'extrême droite FPÖ, est son vice-chancelier. Le FPÖ hérite de six ministères dont l'Intérieur, la Défense et les Affaires étrangères. De quoi hérisser les manifestants venus ce matin.

Avec notre correspondant à Vienne,  Isaure Hiace

A quelques mètres du palais présidentiel, pendant que le gouvernement prête serment, les milliers de manifestants protestent à coup de sifflet.

« J'ai peur que ce gouvernement prenne de mauvaises décisions concernant l'éducation et l'enseignement supérieur mais aussi en matière de sécurité sociale. C'est pour cela que je suis venu, pour montrer que je ne suis pas d'accord », dit Andri, étudiant.

L'extrême droite a déjà participé à un gouvernement en 2000, mais la situation est très différente aujourd'hui selon Juno, car le parti dirige désormais les principaux ministères régaliens. « Certains vont dire que ce n'est pas nouveau que l'extrême droite soit au pouvoir mais avant, le parti n'avait pas ces responsabilités-là et selon moi c'est très dangereux », s'inquiète-t-il.

Pour les manifestants, pas de doute : la mobilisation est un succès. Neuf cortèges sont partis tôt le matin pour se retrouver devant le palais présidentiel, là où les membres du gouvernement ont prêté serment.

Pour autant, le nombre de manifestants est assez faible, au regard de la population autrichienne, qui dépasse les huit millions d’habitants. A en croire les récents sondages, une majorité d’Autrichiens était en effet en faveur d’une coalition entre ces deux partis. Et si l’on compare cette mobilisation à celle de l’année 2000, date de la dernière participation de l’extrême droite à un gouvernement, les chiffres parlent d’eux-mêmes : ils étaient alors 200 000 à protester.

Alexander Pollak, de l'ONG SOS Mitmensch, l'explique par la dédiabolisation réussie du FPÖ. « Il y a une banalisation de ce parti. C'est pour ça qu'il est important que la société civile et ceux qui défendent les droits de l'homme, se fassent entendre et disent non à extrémisme et au racisme »,

Son association a d'ores et déjà prévu plusieurs manifestations début janvier, où il espère plus de monde dans les rues.

Autriche: l’annonce du nouveau gouvernement agite les réseaux sociaux

Les chancelleries étrangères atones

A l'international, cette alliance des conservateurs avec un parti aux valeurs jugées incompatibles avec celles de l'Union européenne n’a, cette fois, pas provoqué de vives réactions : rares sont les voix qui s’élèvent pour s’inquiéter de l’arrivée aux affaires du FPÖ.

Il y a dix-huit ans, l’Union avait décidé de sanctionner Vienne, en suspendant tous les contacts bilatéraux avec le gouvernement Schüssel, après l’arrivée du chef de l’extrême droite Jörg Haider. Cette fois rien de tel : les dirigeants européens veulent croire que le nouveau gouvernement va poursuivre l’aventure avec les 27.
« Le chancelier Kurz a l'intention d'être un partenaire actif en Europe et je m'en réjouis », affirme Angela Merkel.

La France, par le biais du ministère des Affaires étrangères, a adressé ses félicitations au nouveau Premier ministre tout en soulignant qu’elle comptait sur le respect des valeurs européennes du pouvoir autrichien. Vienne a d'ores et déjà exclu d'organiser un référendum sur le maintien dans l'UE et ne compte pas remettre en cause les sanctions européennes contre la Russie.

Donald Tusk se dit confiant dans le fait que le gouvernement autrichien continuera à jouer un rôle constructif. Le président du Conseil européen recevra ce mardi le nouveau chancelier à Bruxelles. Il verra ensuite Jean-Claude Juncker, le président de la Commission.

En France, il faut chercher du côté de l’opposition ou d’anciens responsables pour trouver des voix critiques. François Hollande juge « contraire aux valeurs » de l'Europe la composition du nouveau gouvernement. Son ancien Premier ministre Jean-Marc Ayrault réagit sur Twitter : « Trois ministres d’extrême droite à des postes clefs en #Autriche. Qu’attendent les démocrates européens pour réagir ? »

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