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Avec notre bureau à Bruxelles,
Tsipras propose d'autres réformes
Comme l'espéraient ses créanciers, Athènes a fait de nouvelles propositions de réformes internes qui iraient dans le sens d'un compromis sur les réformes les plus délicates. Même si aucun chiffre n'a été officiellement présenté, les propositions pourraient convenir d'une hausse de certains taux de TVA comme le réclament les créanciers et surtout d'un coup de rabot aux retraites complémentaires des plus fortunés.
La réforme des retraites, c'est la demande principale du Fonds monétaire international (FMI) et si cette formule était avérée, il se pourrait qu'elle soit acceptable pour les électeurs de Syriza.
La Grèce doit payer 1,6 milliard d'euros au FMI d'ici le 30 juin, c'est donc aujourd'hui qu'il faut trouver une solution, ou du moins avancer suffisamment. Les propositions ont été débattues hier par les experts et les négociations ont repris ce lundi entre les 19 ministres des Finances de la zone euro avant le sommet européen extraordinaire convoqué pour ce soir.
Entre scepticisme et optimisme
Du côté des voisins européens, l'optimisme commence à apparaître. Dimanche 21 juin, l'Italie a estimé qu'un accord était possible, quand la Commission européenne évoquait de bonnes bases de progrès tout en prévoyant un accouchement au forceps. Ce lundi matin, le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a affirmé qu'il n'était pas « certain ni indispensable » qu'un accord intervienne dès ce soir.
En revanche, du côté des créanciers de la Grèce, les négociateurs semblent estimer que les propositions grecques sont cohérentes, détaillées et raisonnables. Des qualificatifs que l'on n'avait pas entendus de leur part depuis le début des négociations.
M. Tsipras espère obtenir un effacement partiel de la dette grecque et un desserrement de la rigueur budgétaire. Des propositions que le chef du cabinet du président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a tout de même qualifiées de « bonnes bases de progrès » sur Twitter, sans néanmoins donner de détail sur le contenu desdites propositions. Mais « on attend de voir », résume-t-on quelque peu lassé à Bruxelles. Le commissaire européen Pierre Moscovici dit en tout cas qu'il croit à un accord ce lundi ; un optimisme partagé par les principaux marchés financiers européens, qui ont bondi dans la matinée, y compris à Athènes.
Concessions
Le Fonds monétaire international, la Banque centrale européenne et la Commission européenne le rappellent, des concessions, eux, ils en ont déjà faites tout au long des cinq derniers mois, notamment sur la question de l’objectif d’excédent budgétaire primaire. C’est ce qu’ils répètent d'abord à Alexis Tsipras ce lundi. Ce sera ensuite au tour du controversé ministre grec des Finances, Yanis Varoufakis, d’essayer de convaincre ses 18 homologues de la zone euro chargés de disséquer les propositions d'Athènes. Après cela, toujours ce lundi, les chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro se verront lors d'une ultime rencontre.
En parallèle, la Banque centrale européenne a décidé de relever le plafond des liquidités d'urgence qu’elle peut prêter aux banques helléniques ce lundi matin. C'est la troisième fois depuis mercredi. Ce mécanisme d’urgence permet actuellement de maintenir le système bancaire grec à flot, puisqu'il est confronté à un retrait massif aux guichets de la part des ménages et des entreprises, qui auraient retiré près de 4,2 milliards d'euros de leurs comptes la semaine dernière.
Mince espoir
Depuis cinq mois, Bruxelles a appris à se méfier de l’optimisme de commande qui ne débouche ensuite sur rien de concret. Si l’on peut entrevoir un signal positif dans la réaction dimanche soir d’un proche collaborateur de Jean-Claude Juncker, personne dans les milieux européens ne se risquerait ce lundi à faire un pronostic quant au déroulement de la journée et de la nuit qui suivra. Le bal s'est ouvert dans la matinée par une rencontre entre Alexis Tsipras et le quatuor habituel des créanciers : Juncker, Draghi, Lagarde, Dijsselbloem (président de l'Eurogroupe).
La dernière ligne droite semble malgré tout entamée, ne serait-ce que parce que le calendrier l'induit. Comme toujours en pareil cas, de toutes parts s'élèvent des voix plus ou moins autorisées pour appeler au bon sens, au réalisme, au dialogue sans a priori, à tout ce qui peut escamoter les chiffres sous des considérations purement politiques. Une tendance que redoutent Christine Lagarde et le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble, car elle bénéficierait surtout à la partie grecque.
Pour citer le collaborateur de M. Juncker, si accouchement il y a, ce sera aux forceps. D'autant plus qu'Athènes fait blocage, notamment sur la réforme des retraites exigée par le FMI en échange de la dernière tranche d'aide de 7,2 milliards d'euros, une somme vitale pour que le pays rembourse une partie de sa dette européenne. Sans accord d'ici le 30 juin prochain, la Grèce sera en défaut de paiement avec pour conséquence une sortie de la zone euro, le fameux « Grexit ».
Les conséquences d'un défaut de paiement
Chacun planche sur les conséquences possibles d'un éventuel « Grexit ». Si cela se produit, « bien sûr, les Etats européens devront accepter des pertes, analyse Christopher Dembik, économiste chez Saxo Banque. On a, comme estimation visuelle pour la France, chaque contribuable exposé à 650 euros. Ce qu'il est important de souligner malgré tout, c'est que ça n'entraîne pas automatiquement, dans un premier temps, de hausse de la dette publique française, tout simplement parce que les prêts accordés à la Grèce sont déjà intégrés dans notre dette publique. »
En revanche, l'économiste souligne que la France comptait récupérer des intérêts en prêtant à la Grèce, et qu'elle devra y renoncer si les négociations n'aboutissent pas.« En l'occurrence, les intérêts étaient à peu près de 400 millions par an anticipés, d'après le gouvernement français, précise-t-il. Evidemment, déjà, ce sera une perte pour la France. L'autre aspect, qui sera un peu plus important, c'est qu'on peut tout à fait craindre qu'il y ait une aversion aux risques très importante des investisseurs, qui va gripper la croissance. Et donc, un Grexit devrait finalement réduire le potentiel de croissance et conduire à une nouvelle crise mondiale. C'est tout à fait probable aujourd'hui. »
→ Le ministre français des Finances Michel Sapin est l'invité de RFI