Des observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) devaient tenter d'atteindre Debaltseve ce mardi, alors que la chancelière allemande avait fait savoir, après des échanges téléphoniques lundi soir, qu'un accord et des « mesures concrètes » avaient été trouvés avec les dirigeants russe et ukrainien pour garantir à ces observateurs un « libre accès » dans l'est ukrainien.
Mais pour la première fois dans l’est, des combats en face à face ont éclaté ce mardi 17 février dans les rues de cette ville du Donbass, qui constitue un nœud ferroviaire entre l’Ukraine et la Russie, et un pont routier stratégique à mi-chemin entre les régions de Donetsk et Lougansk, les deux villes ukrainiennes majeures actuellement sous contrôle séparatiste.
Avant la guerre, Debaltseve comptait 25 000 habitants. Des milliers de soldats ukrainiens seraient néanmoins retranchés à l’intérieur de la ville, qui est pratiquement encerclée par les forces pro-russes. Depuis plusieurs semaines, ces dernières ont fait de ce lieu un enjeu militaire majeur. Elles avait d'ailleurs déjà demandé aux soldats ukrainiens présents dans la localité - c'était avant le sommet de Minsk - de se rendre pour sauver leur vie.
Malgré la trêve, l'armement lourd est encore utilisé à Debaltseve
Jusqu'ici, les combats se cantonnaient autour de Debaltseve, et non à l'intérieur. Or, ce mardi dans la ville elle-même, « les rebelles utilisent des mortiers, des lance-grenades et des armes à feu. Il y a des morts et des blessés mais je n'ai pas de chiffres précis car les combats continuent », a assuré dans la matinée à l’Agence France-Presse le chef adjoint de la police régionale, Ilia Kiva, qui se trouve sur place.
« Des groupes isolés d'insurgés ont pénétré dans la ville », minimise - tout en confirmant - Oleksandre Motouzianyk, un porte-parole militaire ukrainien, alors que l’agence de presse officielle des rebelles cite d’ores et déjà un responsable militaire séparatiste en ces termes : « Nous contrôlons la gare ferroviaire et la banlieue est », soit deux lieux où sont signalés des combats. Les forces ukrainiennes disent de leur côté qu'elles respectent le cessez-le-feu mais qu'elles doivent faire parler les armes pour riposter aux offensives adverses. Kiev dément en revanche l'information séparatiste selon laquelle des soldats ukrainiens de Debaltseve se seraient rendus.
Selon un journaliste de l'agence de presse Reuters présent dans les alentours de Debaltseve, une chose est sûre : des obus d'artillerie tombaient ce mardi toutes les cinq secondes sur la ville, et de violents combats avaient lieu à ses abords. Selon Reuters, les séparatistes bombarderaient aussi Debaltseve à coups de missiles Grad, et des colonnes de fumée s'élevaient de la ville à la mi-journée.
Deux jours après l'instauration d'une trêve, pas d'accalmie en vue
Les séparatistes et leur allié russe souhaitent-ils conforter les positions acquises avant que les armes ne se taisent comme convenu à Minsk jeudi dernier ? Cette dégradation sur le front militaire tombe quoiqu'il en soit au plus mal. Ce mardi devait être le jour où, selon cet accord, l’armement lourd des deux camps devait quitter le front, pour permettre l’établissement de facto d'une trêve décrétée depuis dimanche à minuit.
La situation sur le front de Debaltseve, point le plus chaud de la guerre d'Ukraine, semble indiquer que le conflit pourrait ne pas connaître de trêve dans l'immédiat. Kiev dit avoir perdu encore cinq de ses soldats lors de ces dernières 24 heures (soit dix depuis la proclamation du cessez-le-feu), la plupart tombés dans la région de Debaltseve précisément. L'armée dit avoir enregistré pas moins de 150 attaques rebelles en deux jours.
Le fait que des combats ont toujours lieu ne signifie pas que les accords de Minsk sont morts, analysait cependant, ce mardi matin, notre envoyé spécial à Donetsk Régis Genté. Notre confrère rappelait qu'il n’existe pas beaucoup d’exemples dans l’histoire de cessez-le-feu appliqués en totalité dès les premiers jours. Mais vu de cette capitale séparatiste, l'impression qui règne, c'est que les rebelles veulent effectivement s’emparer coûte que coûte de cette « poche » de Debaltseve avant d'observer une trêve.