Avec nos envoyés spéciaux à Donetsk, Boris Vichith et Anastasia Becchio
Avec 81,37 % des voix, Alexandre Zakhartchenko a été élu ce dimanche « président » de la république autoproclamée de Donetsk. Commandant d’unités rebelles, désigné en août dernier « Premier ministre » de la république autoproclamée de Donetsk, Zakhartchenko était le grandissime favori de ce scrutin dont l’issue ne faisait aucun doute. Beaucoup parmi les électeurs étaient en fait incapables de citer les deux autres candidats.
Il faut dire que les autres candidats, n’en étaient pas vraiment. A Donetsk, par exemple, rares étaient les électeurs qui étaient capables de citer les noms des deux autres concurrents sans jeter un œil sur le bulletin de vote. A Donetsk, même le vainqueur, Alexandre Zakhartchenko, issu d’une famille de mineurs, était encore inconnu du public il y a quelques mois. A 38 ans, cet ancien électricien a rapidement gagné ses galons en participant à la rébellion séparatiste à Donetsk, et Sloviansk.
Dans la république autoproclamée voisine de Lougansk, c’est un ancien militaire, qui a été élu. Igor Plotnitski, un homme à la carrure imposante, âgé de 50 ans, nostalgique de l’Union soviétique. Et qui s’est reconverti dans les affaires après la chute de l'URSS. L'homme a été accusé par la justice ukrainienne d'avoir transféré en Russie la pilote militaire ukrainienne Nadia Savtchenko, capturée par les rebelles au cours de combats et toujours emprisonnée en Russie. Sans surprise ce sont les partis de ces deux hommes qui s’imposent également aux législatives.
Une « farce » pour Kiev
Cette série d'élections, qualifiée de « farce » par Kiev, est dénoncée par les pays européens et les États-Unis. Seule la Russie a annoncé « respecter » les résultats. Aucune organisation internationale n'a d'ailleurs envoyé d'observateurs pour ces élections. Mais les autorités locales, elles, ont fait venir leurs propres observateurs, une petite vingtaine de personnalités issues pour la plupart de l’extrême droite européenne – le Jobbik hongrois, le Vlaams Belang flamand ou encore le Rassemblement bleu marine français. Des personnalités que Kiev a d’ores et déjà déclarées persona non grata, qui se déplacent ici sous forte escorte rebelle.
Les organes chargés de surveiller le scrutin annoncent des taux de participation de 62% dans chacune des entités. Il faut savoir que les listes électorales étaient incomplètes et que chacun avait la possibilité de voter dans n'importe quel bureau. En général, l’affluence a été au rendez-vous. A Lougansk, les gens ont fait la queue dans le froid pendant des heures. Il faut dire que les électeurs se voyaient aussi remettre des cartes pour l’aide sociale. Autre facteur à prendre en compte : le nombre de bureaux de vote avait été fortement réduit. Dans une ville comme Ilovaïsk, à une heure de rout de Donetsk, par exemple, seuls 3 bureaux de vote fonctionnaient hier, dimanche, contre 8 habituellement, ce qui peut donner une image un peu erronée de la mobilisation.
Climat tendu
Cette série d'élections s’est déroulée dans un climat tendu. Dans l’après-midi, Kiev a dénoncé tout à l’heure un déploiement « intense d'équipements et de troupes » en provenance de la Russie. Sur le terrain, des colonnes de camions militaires bâchés ont été aperçues sur la route qui relie Rostov-sur-le-Don en Russie à Donetsk. Selon l'AFP, des véhicules transportant des mitrailleuses antiaériennes se sont approchés de l'aéroport de Donetsk
Ces équipements et les hommes qui les accompagnent arrivent-ils récemment de Russie ? S’agit-il de nouveaux équipements, ou d’armes déplacées d’un point à l’autre du territoire que les rebelles contrôlent ? Impossible à dire pour l’instant. Les véhicules ne portent ni plaque d’immatriculation, ni signe distinctif. Seule certitude, cela ajoute à la tension ambiante et n'est pas de nature apaiser une population qui n'aspire qu'à une chose : que cessent les hostilités.