Il aura fallu dix ans de bataille aux actionnaires de l'ancien numéro 1 du pétrole russe pour obtenir gain de cause : une condamnation de la Russie pour avoir exproprié Ioukos, à l'époque où la compagnie était dirigée par Mikhaïl Khodorkovski. L’oligarque millionnaire avait osé défier le Kremlin. Il avait été incarcéré en 2003, et condamné à 10 ans de prison pour détournements de fonds et fraude fiscale avant d'être finalement gracié, à la surprise générale, par Vladimir Poutine, en décembre dernier quelques mois avant d'avoir purgé sa peine.
Leonid Nevzline, principal bénéficiaire du dédommagement
Le groupe Ioukos, qui pesait avant 2003 quelque 40 milliards d'euros, a été démantelé et la majeure partie de ses avoirs ont été transmis à Rosneft, l'actuel numéro 1 du pétrole russe, dirigé par Igor Setchine, un ancien collaborateur de Vladimir Poutine.
La Russie devra verser ces 50 milliards de dollars de dédommagement d'ici janvier prochain au groupe Menatep, holding par l'intermédiaire de laquelle Mikhaïl Khodorkovski contrôlait Ioukos, et que l'homme d’affaires, incarcéré, avait vendue à l’un de ses associés - Leonid Nevzline -, avant que ce dernier ne prenne la fuite en Israël pour échapper à la justice russe.
A l'annonce de la décision de la cour de La Haye, à la mi-journée ce lundi, le titre Rosneft perdait 1,4 %.
Moscou conteste
Avec notre correspondante à Moscou, Veronika Dorman
Moscou conteste évidemment la décision de la cour d’arbitrage de La Haye.
Première réaction, celle de Rosneft. le groupe pétrolier public russe, devenu un géant mondial après le démantèlement de Ioukos et l’emprisonnement de son patron, Mikhaïl Khodorkovski.
Les transactions à l’époque étaient « tout à fait légitimes et conformes à la législation », affirme Rosneft, accusé par les plaignants d’avoir bénéficié du hold-up de Ioukos par l’État russe. Le Kremlin aurait alors fait d’une pierre deux coups : il se débarrassait d’un oligarque trop ambitieux politiquement, tout en s’appropriant son empire industriel.
Le ministère russe des Finances a, quant à lui, dénoncé les lacunes importantes du jugement, rendu par un tribunal qui n’est pas compétent sur le sujet. La Russie va faire appel en vue d’obtenir une annulation dudit jugement. L’ intention a été confirmée
aussi par le ministre des Affaires étrangères russes, Sergueï Lavrov, qui a déclaré que Moscou allait « utiliser toutes les options juridiques disponibles pour défendre sa position ».