Avec notre correspondante à Moscou, Anastasia Becchio
« La Cour a entièrement démenti les accusations selon lesquelles les poursuites à l'encontre de la compagnie Ioukos avaient un caractère répressif », le ministère russe de la Justice se félicite en ces termes de la décision de la Cour de Strasbourg.
Les magistrats de la Cour ont estimé que l’article 14 de la convention européenne des droits de l’homme n’avait pas été violé. Cet article interdit la discrimination fondée notamment sur des critères politiques. Cette décision a aussitôt été saluée par le ministère russe de la Justice. Elle survient trois mois après un autre arrêt de Strasbourg, qui avait refusé de voir un caractère politique dans la condamnation de l’ancien patron de Ioukos, Mikhail Khodorkovski à 13 années de prison.
La Cour européenne des droits de l’homme estime, en revanche, que l’article 6 qui définit le droit à un procès équitable n’a pas été respecté. Elle estime que les patrons de Ioukos n’ont pas eu assez de temps pour préparer leur dossier face au fisc. En mai 2004, les avocats du groupe avaient disposé de quatre jours pour étudier les 43 000 pages du dossier de fraude fiscale.
Les choses s’étaient ensuite rapidement enchaînées : le redressement fiscal massif avait conduit à la liquidation puis au démantèlement du géant pétrolier. Ses principaux actifs sont alors passés aux mains de grosses entreprises, parmi lesquelles Rosneft, l’actuel géant russe du secteur. Depuis, les patrons de Ioukos, Miklhail Khodorkovski et Platon Lebedev ont eux été jugés et condamnés à deux reprises pour fraude et détournement de pétrole.
Les avocats de Ioukos n’ont pas encore régi publiquement. Lors du procès, ils avaient tenté de démontrer le caractère politique des poursuites engagées contre la compagnie en dénonçant une expropriation d’Etat. Quant aux anciens actionnaires de Ioukos, qui demandaient 98 milliards de dollars de dédommagement, ils devront encore patienter. Les juges ont reporté leur décision, tout en invitant deux parties à rechercher un accord sur le sujet.