Avec nos envoyés spéciaux à Kiev, Mathias Taylor et Anastasia Becchio
Assis sous une tente jaune, un thermos de café à portée de main, avec une pile de tracts appelant à voter pour l’ancien ministre de la Défense, Anatoliy Grytsenko, Igor a l’air de s’ennuyer un peu.
« Je ne sais pas si on peut dire que je m’ennuie. En fait, je suis très occupé : quand le vent souffle, par exemple, la tente se renverse, et il faut alors que je la relève, puis il faut que je ramasse les tracts qui se sont envolés. C’est surtout des femmes âgées qui viennent me voir, des personnes qui ont besoin de parler à quelqu’un. Voilà comment je passe le temps. »
Campagne assez morne
Sur la place de l’Indépendance toute proche, les musiciens de rue ont bien plus de succès qu’Igor et ses tracts politiques. La campagne a été assez morne surtout en raison des événements de l’est, explique Victor qui dirige une unité d’autodéfense de Maïdan.
« Cette campagne est bien sûr marquée par la situation tendue dans le pays. C’est pourquoi on n’a pas eu, cette fois-ci, de campagne fastueuse, comme on en avait eu par le passé. Cette campagne a été marquée par une certaine retenue. »
Si la campagne a été calme, les observateurs s’attendent à voir des bureaux de vote animés. Près de 7 Ukrainiens sur 10 devraient se rendre aux urnes dimanche.
Les ultranationalistes, ultraminoritaires
Parmi les candidats à la présidentielle anticipée de ce dimanche : l’ultranationaliste Dmytro Yarosh dont le mouvement, Pravy Sektor, s’est fait connaître cet hiver en lançant des cocktails molotov sur la place de l’Indépendance contre les forces de l’ordre.
Ses hommes en treillis, portant un brassard noir et rouge, patrouillent souvent sur la place de l’Indépendance et ses environs. Lui a troqué la tenue paramilitaire pour le costume de candidat à la présidentielle. A 42 ans, Dmytro Yarosh, recherché pour terrorisme en Russie, veut apparaître comme un modéré.
« Je veux rassurer les habitants des régions de Lougansk et Donetsk, que le Pravy Sektor n’a aucune intention d’imposer une ukrainisation forcée des régions russophones, assure t-il. Nous voulons juste la paix et la sécurité, comme n’importe quelle autre personne dans ce pays »
Pravy Sektor a gagné en notoriété cet hiver en étant en première ligne des combats sur la place de l’Indépendance. Mais si le mouvement ultranationaliste a sans doute joué un rôle important à Maïdan, il est loin de peser dans la politique ukrainienne, selon le politologue Anatoly Oktysiuk. « Leur rôle est très exagéré, explique t-il. Selon les derniers sondages d’opinion, moins de 2% de la population les soutient. Actuellement, l’intérêt de la société pour les nationalistes est très faible, parce que nous avons eu une révolution, nous avons traversé une période très difficile, et maintenant les gens veulent vivre en paix ».
Les derniers sondages d’opinion accordaient moins d’1% de suffrages à Dmytro Yarosh.
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