Avec nos envoyés spéciaux à Donetsk, Daniel Vallot et Bertrand Haeckler
Le président intérimaire, Olexandre Tourtchinov, a estimé ce samedi qu'en cas de « oui » au référendum, « une sécession d'avec l'Ukraine serait un pas vers l'abîme pour ces régions ». II a donc exhorté les électeurs concernés à rejeter les propositions des séparatistes.
En attendant, à la veille du scrutin, aucun incident majeur n'a été déploré dans les grandes villes de l'est du pays. Hier, de violents affrontements avaient éclaté à Marioupol (environ 100 km au sud de Donetsk), au cours desquels vingt personnes avaient trouvé la mort.
Confiances des organisateurs
A Donetsk, la tension reste cependant largement palpable, ainsi qu’une crainte permanente chez les miliciens, mais aussi chez les habitants de la capitale régionale, de voir la situation basculer de nouveau dans la violence.
Les dirigeants séparatistes, eux, répètent à l’envi leur confiance dans le bon déroulement du scrutin, ce « pseudo-référendum » comme l’ont baptisé les autorités ukrainiennes. « Nous avons tout prévu, affirment les responsables du mouvement pro-russe, et la sécurité des bureaux de vote sera garantie. »
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Miliciens armés dans les bureaux de vote
La sécurité sera en effet l’enjeu majeur de ce jour de vote. Elle a donc été largement renforcée par les militants pro-russes, maîtres des lieux. Désormais, trois contrôles sont effectués à l’entrée de l’administration régionale de la ville, quartier général des séparatistes et des miliciens en armes seront postés devant et à l’intérieur des bureaux de vote.
Ils ont visiblement reçu de nouvelles consignes : les sacs sont soigneusement fouillés, les visiteurs palpés. Ces consignes vaudront également demain.
« Nous serons très vigilants. La sécurité est un sujet qui nous préoccupe énormément. Et les bureaux de vote seront surveillés à la fois par la police et par nos miliciens, promet Roman Lyaguine, responsables de la commission électorale mise en place par les séparatistes de Donetsk. Nous avons prévu tous les cas de figure. Je pense que tout se déroulera conformément au plan que nous nous sommes fixés. Ce référendum va se dérouler tout à fait normalement, ce sera comparable à ce qui se fait chez nous, ou dans d’autres pays. C’est la même procédure. »
Les séparatistes, qui espèrent une mobilisation massive, accusent les autorités de Kiev de vouloir à dessein empêcher les habitants de la région de se rendre aux urnes.
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La population sceptique
Les adversaires du projet séparatiste ont quant à eux décidé de ne pas participer à ce vote qu’ils considèrent comme mascarade. Dans ce quartier tranquille de la périphérie de Donetsk, les miliciens pro-russes se font moins visibles et moins menaçants. La parole y est plus libre que dans le centre ville. Nombreux sont les habitants à s’interroger sur la validité de ce référendum
« Je sais très bien comment se passe une élection normale. Là on n’y comprend rien !
On nous dit qu’on va voter pour une chose, puis pour une autre, qu’après ce référendum, il y en aura un deuxième pour le rattachement à la Russie. Ca n’a ni queue ni tête ! »
Dans le quartier, certains se méfient tout de même de leurs voisins, ouvertement pro-russes, et préférent s’éloigner pour faire part de leurs critiques. Comme Sergueï qui restera chez lui ce dimanche. De toute façons, dit-il, ce référendum est joué d’avance :
« Ceux qui organisent le vote savent déjà quel résultat ils vont annoncer. Même si personne ne va voter, ça ne changera rien. Pour moi, ce référendum est organisé par un bande d’escrocs. Ils seront tous seuls dans les bureaux de vote, sans observateurs, avec leurs miliciens armés jusqu’aux dents. Voilà à quoi va ressembler ce "réferendum". »
Avec sa femme et ses trois enfants, Sergueï va prendre des vacances anticipées dès mardi. « Dès que les pro-Russes auront annoncé leur victoire, dit-il, le climat déjà très tendu va devenir irrespirable. »
Les résultats seront annoncés lundi 12 mai dans l'après-midi. Sauf incident majeur, précisent les séparatistes. Mais davantage encore qu’en Crimée, il sera impossible de vérifier la réalité des chiffres avancés par les organisateurs.