De notre correspondante à Moscou,
On voyait mal comment la Russie allait garder les trente prisonniers jusqu’aux Jeux olympiques. D’autant qu’il y a parmi eux 27 ressortissants étrangers et que la prolongation de la garde à vue de trois mois menait au 24 février. Il fallait donc trouver une porte de sortie.
Dans un premier temps, il y a donc eu une requalification des faits. L’accusation de piraterie a été remplacée par celle de hooliganisme. Vladimir Poutine lui-même avait dit que l’action de Greenpeace était illégale, mais que ce n’était pas de la piraterie.
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Dans un deuxième temps, il y a eu une amélioration des conditions d’incarcération des militants de Greenpeace. Car même s’ils restent discrets, les militants laissent bien entendre que c’était beaucoup plus difficile à Mourmansk qu’à Saint-Pétersbourg. D’un point de vue psychologique, au moins, la détention à Mourmansk a été éprouvante, d’autant qu’ils étaient séparés les uns les autres. Ils se sont retrouvés pendant le transfert à Saint-Pétersbourg, où ils ont aussi retrouvé une certaine forme, afin d’être présentables lors des audiences.
Une audience pour la forme
Pour le reste un avocat confiait jeudi à RFI qu’à Mourmansk, « il avait été décidé de tous les arrêter, quoi qu’on dise. Et ici, à Saint-Pétersbourg, il a été décidé de tous les libérer, peu importe ce que disent les enquêteurs. » De fait, à l’audience, on avait l’impression que ni le procureur, ni le juge n’étaient convaincus par ce qu’ils disaient. On avait l’impression de voir jouer une mauvaise comédie.
Les militants de Greenpeace sont toujours inculpés, et doivent donc rester à la disposition de la justice russe et ne peuvent pas quitter le territoire de la Fédération de Russie. Les Russes sont rentrés chez eux. Quant aux autres, ils ne vont pas quitter Saint-Pétersbourg pour la bonne raison que la plupart n’ont pas de visa, voire pas de passeport, puisqu’ils sont entrés en Russie indépendamment de leur volonté.
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Selon un avocat interrogé par RFI, l’affaire va peut-être même être encore requalifiée, et il y aura un jugement. A moins qu’il n’y ait pas de jugement, puisque l’on attend une amnistie en décembre à l’occasion des 20 ans de la Constitution russe. Amnistie dont les 30 de Greenpeace pourraient bénéficier.
Le cas Colin Russel
Reste le cas de l’Australien Colin Russel, qui est passé en premier et a vu sa détention prolongée de trois mois. Soit son cas va être réexaminé rapidement, en alléguant un problème de procédure, soit il sera réexaminé dans le cadre d’un appel. Son avocat et le consul australien sont confiants.
Quand au navire, l’Arctic Sunrise, qui bat pavillon néerlandais, il est toujours coincé à Mourmansk. Jeudi 21 novembre, un tribunal de la ville a rejeté une demande de libération du navire déposée par la société propriétaire du navire. Mais c'est ce vendredi que le tribunal arbitral de la mer de Hambourg, saisie par les Pays-Bas, doit prendre une décision. Les Pays-Bas demandent la libération du navire et de l'équipage. La Russie a refusé de prendre part aux audiences.
■ A sa sortie de Prison, Francesco Pisanu veut « un peu d'air frais »
Francesco Pisanu est sorti de prison vers 17 h 30, sous les flashes des photographes. Il a été suivi, peu de temps après, par six autres militants étrangers de Greenpeace, eux aussi libérés sous caution.
Les premiers mots du Français, apparemment en bonne forme physique, ont été pour se réjouir, mais il a refusé de s’exprimer sur ses conditions de détentions. Pour le moment. Des conditions de détention qui ont été différentes, en fonction des lieux. « Mais je ne parlerai pas à la presse tant que l’affaire judiciaire ne sera pas finie pour des raisons évidentes de sécurité », a-t-il insisté au micro de RFI, se donnant pour objectif des heures à venir de « jeter un coup d’œil au ciel et [d’]apprécier un peu d’air frais ».
Officiellement, il doit en effet rester à la disposition de la justice russe pendant tout le temps nécessaire à l’enquête. Il est toujours inculpé de hooliganisme.
Le consul de France à Saint-Pétersbourg est venu chercher Francesco Pisanu, qui va désormais séjourner dans un hôtel de l’ancienne capitale impériale. Le diplomate a tenu à insister sur les précautions que le Français devait prendre dans ses propos pendant cette période.