A Chypre, les mesures d'austérité dépassent les demandes de la Troïka

Un seul mot d'ordre à Chypre : l'austérité. Le gouvernement vient d'approuver le budget 2014. Et pour éviter un deuxième plan de sauvetage, Nicosie joue la carte de l'économie dans tous les secteurs. Quitte à aller plus loin que les mesures exigées par la Troïka.

De notre correspondant à Nicosie

Dans le budget pour l'an prochain, les dépenses de l'Etat sont en baisse de 10%. Elles passent de 6,2 à 5,6 milliards d'euros. Coupes dans les prestations sociales, baisses des retraites et baisses des salaires dans le public et le privé. Le tout accompagné d'une hausse des impôts, notamment un point de TVA et une hausse des taxes sur les carburants.

Pour alléger le poids de la fonction publique, il n'y aura pas de nouvelles embauches ; un départ à la retraite sur quatre seulement sera remplacé. D'après les prévisions de croissance, après une contraction de 8,7% cette année, l'économie devrait se contracter de 3,9% l'an prochain. Même le FMI n'en demandait pas tant.

Chypre, 18% de taux de chômage

Les mesures prises par le président Anastasiades sont pour l'instant au-delà des demandes de la Troïka. Ce qui a valu récemment un satisfecit des bailleurs de fonds, qui ont prêté 10 milliards d'euros en mars en échange d'un plan drastique - qui a vu les comptes en banques de plus de 100 000 euros des deux plus grandes banques du pays être largement ponctionnés.

Autant de mesures qui laissent augurer des temps difficiles. Déjà, le chômage atteint un taux record à 18% et les prévisions annoncent 20% en 2014. Les centres de distribution de nourriture aux plus pauvres sont débordés.

Des SDF à Nicosie, un fait nouveau

De nombreuses associations caritatives ne parviennent plus à suivre la demande et sont obligées de fermer leurs portes. On compte désormais des personnes sans domicile, fait nouveau à Chypre. Les faillites d'entreprises se comptent par centaines, le centre-ville de Nicosie voit ses boutiques fermer les unes après les autres. Et devant le pôle emploi local, des queues se forment une heure avant l'ouverture. Du jamais vu.

Une bouffée d'oxygène pourrait venir des banques qui, pour l'heure, verrouillent les crédits par crainte d'impayés. Mais pressées par la Banque centrale et par le gouvernement, elles pourraient permettre à de nombreuses entreprises de survivre si elles assouplissaient les conditions d'attributions des prêts. Une levée du contrôle des capitaux est également attendue d'ici trois mois.

Les erreurs passées de Chypre

En présentant ce budget, qui doit être soumis au vote avant la fin de l'année, le ministre des Finances Harris Georgiades a affirmé que Chypre payait aujourd'hui le prix des lourdes erreurs du passé. Cible de toutes les critiques : l'ancien président communiste. Il est accusé d'être à l'origine du désastre économique du pays.

Dimitris Christofias, qui a dirigé le pays de 2008 à février dernier, est politiquement responsable de l'effondrement économique de Chypre. Ce sont les conclusions d'une commission d'enquête parlementaire chargée d'établir les responsabilités de la crise. Selon elle, le mot d'ordre de l'ancien chef de l'Etat a été : « Je gouverne, je fais ce que je veux. » Il a trop dépensé, a mené une politique fiscale imprudente et n'a pas écouté les conseils des experts.

En août, l'ancien président communiste avait claqué la porte de cette commission d'enquête, estimant qu'on ne pouvait pas traiter un homme de son rang comme un simple citoyen. De quoi achever de miner une réputation désormais exécrable. Quinze gardes du corps sont mobilisés en permanence pour assurer sa sécurité.

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