Avec nos journalistes à Berlin, Heike Schmidt et Pascal Thibaut
Le triomphe historique, l’euphorie, c’était hier. Ce lundi 23 septembre commence une mission qui ne sera pas une partie de plaisir pour Angela Merkel et ses troupes. Privés de leurs alliés traditionnels, les Libéraux, les chrétiens-démocrates n’ont pas d’autre choix que de se rapprocher de la gauche. On s’attend ici à une véritable offensive de charme.
Contacts avec le SPD et les Verts
« Chancelière cherche partenaire », titre le quotidien Berliner Zeitung ce lundi. Les premiers pas ont rapidement été faits. «Nous sommes ouverts pour mener des discussions», a déclaré Angela Merkel ce lundi midi. «J'ai eu un premier contact avec le président du SPD (Sigmar Gabriel, ndlr)», a-t-elle précisé, ajoutant ne pas exclure «d'autres contacts» éventuels avec les Verts.
L’actuelle et future chancelière va certainement se donner une bonne semaine pour tâter le terrain. Selon les sondages, la préférence des Allemands va à l’option d’une «grande coalition» avec les sociaux-démocrates. Toutefois, ces derniers semblent assez méfiants. Ils se souviennent que leur participation au premier gouvernement Merkel leur avait coûté très cher aux élections suivantes.
Le SPD promet de vendre chèrement son ralliement
Mais si les sociaux-démocrates veulent la stabilité politique, ils n’ont guère d’autres choix que d’accepter de former une grande coalition avec la CDU. Mais, fort de ses 192 sièges au Bundestag, le SPD promet de vendre chèrement son soutien.
Les sociaux-démocrates tenteront donc d’imposer leurs conditions : le salaire minimum, par exemple, ou encore une augmentation d’impôts pour les grandes fortunes. Ils ont une importante carte à jouer : mathématiquement, les trois partis de gauche - les Verts, le SPD et Die Linke - disposent d’une majorité de 319 sièges sur 630 au Bundestag. Ils seraient donc, théoriquement en tout cas, en mesure de faire tomber Angela Merkel.
Les intéressés ont, en principe, un mois pour parvenir à un accord, car, selon la Constitution allemande, les fonctions du gouvernement fédéral sortant prennent fin avec la réunion d’un nouveau parlement. Celui-ci doit se réunir au plus tard le trentième jour qui suit les élections.
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■ Dans la presse allemande : « Mutti et les nains »
L’image de la chancelière rayonnante hier soir orne les unes de tous les journaux. Le quotidien populaire Bild Zeitung titre sur « le plus grand triomphe de Merkel ». Le journal, comme d’autres commentateurs, place celle qui vient de l’emporter pour un troisième mandat à la tête de l’Allemagne dans la lignée de ces prédécesseurs : Konrad Adenauer et Helmut Kohl.
Une caricature dans le quotidienBerliner Zeitung montre une Angela Merkel plantureuse souveraine sur son trône, dirigeant seule l’Allemagne. Le journal populaire Berliner Kurier titre sur « Mutti » - maman, le surnom de la chancelière - et « les nains », à savoir les dirigeants des autres partis.
Le « merkelisme » : l'art de ne pas se mettre en avant
Le quotidien de centre gauche Süddeutsche Zeitung évoque le « merkelisme », une politique de pouvoir qui a l’art de ne pas mettre en avant sa puissance. Le journal conservateur Die Welt souhaite que la chancelière, qui n’a plus rien à perdre, utilise sa victoire éclatante pour lancer des réformes ambitieuses, en Allemagne comme en Europe.
Avec qui ? Beaucoup de commentateurs se le demandent, puisqu’Angela Merkel doit trouver un partenaire pour disposer d’une majorité au Parlement. Pour le Süddeutsche Zeitung, une alliance avec les Verts serait la solution la plus ambitieuse, la plus innovante, mais aussi la plus risquée. Et le journal de se demander si ces qualificatifs sont compatibles avec la personne d’Angela Merkel.