de notre correspondante à Moscou
Le prochain gros morceau sera les Jeux olympiques d’hiver de Sotchi, dans le sud du pays, dans moins de six mois. Il y aura aussi la première édition russe du Grand prix de Formule 1, en octobre 2014, ou l’année suivante. En 2017, on entamera une grande page foot, avec la coupe des confédérations et pour terminer, en 2018, le Mondial.
Des événements dont les professionnels du tourisme attendent beaucoup.
« Jusqu'à aujourd'hui, l'image de la Russie a été marquée par des stéréotypes à l'étranger, estime Ilya Oumanskij, directeur du comité des tours-opérateurs de Russie. Pour beaucoup, c'est encore un pays un peu sauvage. Et c'est pourquoi, l'organisation de tels événements, comme les championnats du monde d'athlétisme, le Mondial de football et les Jeux olympiques, va dans le sens d'une amélioration de l'appréciation de la Russie à l'étranger. Et bien sûr, cela a aussi des répercussions sur le flux touristique. »
240 000 billets gratuits
Dans le cas des Mondiaux d’athlétisme, qui se déroulent en ce moment à Moscou, on ne peut cependant pas totalement parler d’une opération séduction réussie. A vrai dire, ces championnats ne suscitent pas beaucoup d’enthousiasme. Les autorités locales ont même dû mettre à la disposition des Moscovites 240 000 billets gratuits, mais visiblement, ça ne suffit pas : il y a beaucoup de sièges vides dans le stade. Des athlètes célèbres l'ont d'ailleurs déploré publiquement, tout comme certaines personnalités venues soutenir l'équipe de France.
« Ca donne un peu l'impression d'une organisation a minima, regrette également le juge Eric Halphen passionné d’athlétisme, venu encourager l’équipe de France. C'est à dire qu'on a fait les choses parce qu'il fallait les faire. Dans la ville, il y a très peu d'affiches annonçant les championnats du monde. Les commerçants, les cafés, les restaurants ne sont pas tellement à l'unisson de cette compétition. Moi j'ai l'expérience de Berlin, il ya quelques années (en 2009, NDLR), c'était les championnats du monde également. Les commerçants avaient des drapeaux pour vanter tel ou tel pays. Là, on a vraiment l'impression d'un truc un peu terne. Je ne sais pas si c'est Poutine qui voulait cela, je trouve que ça manque un peu de flamme. »
« Il n'y a personne à Moscou »
Or c'est tout le contraire. Vladimir Poutine a choisi le sport pour promouvoir certaines valeurs patriotiques et contribuer à donner une autre image du pays à l’étranger. On se souvient comment il s’est battu pour obtenir les Jeux olympiques à Sotchi, puis le Mondial 2018.
La raison de cette désaffection du public serait en fait beaucoup plus simple que ça, selon politologue Alexei Moukhine. « Chez nous, les Moscovites, comme à Paris d'ailleurs, août est un très mauvais mois pour organiser de gros événements. Il n'y a personne à Moscou. C'est juste technique, il n'y a rien de politique dans tout cela : le public ciblé n'est tout simplement pas là. Tout le monde est parti ».
Freins au développement du tourisme
Si les Moscovites ont déserté la capitale, les touristes auraient pu prendre le relais, mais visiblement, Moscou n’est pas encore une grande destination touristique. Il reste encore des freins au développement de ce secteur : le trop petit nombre d’hôtels à des prix abordables, la quasi-absence d’écriteaux en lettres latines, les problèmes d’embouteillages monstres et la barrière des visas. Mais les choses changent selon le directeur du comité des tours-opérateurs de Russie.
«Pour le moment, reconnaît en effet Ilya Oumanskij, Moscou n'est pas une ville agréable, mais je constate quand même une dynamique positive. Si les touristes qui viennent aujourd'hui étaient venus il y a cinq ans, ils auraient réellement détesté cette ville, parce qu'il n'y avait rien pour qu'ils puissent se sentir bien à Moscou. En réalité, le touriste étranger était surtout perçu comme un sac d'argent, qu'il fallait délester au maximum. J'espère que tout ça va changer et d'ailleurs je vois que cela change déjà. »
Selon les données officielles, l’an dernier, Moscou a battu un record de fréquentation touristique, avec 5,1 millions de personnes, et les autorités s’attendent à recevoir un demi million de personnes supplémentaires cette année, grâce, en partie à ces championnats du monde d’athlétisme.