Turquie: la place Taksim réfléchit à la proposition de référendum du gouvernement

La capitale Ankara a connu une soirée troublée par des heurts entre force de l'ordre et opposants mais nuit calme à Istanbul où les protestataires avaient réinvesti les lieux d'où les forces de l'ordre les avaient délogé la veille. Mercredi 12 juin aussi, le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a reçu certains représentants de la contestation et la perspective d'un référendum sur l'usage du désormais mondialement célèbre parc Gezi a été évoquée. Place Taksim, les opposants ont fait le point.

Avec notre correspondant à Istanbul, Jérôme Bastion

La place de Taksim et le parc Gezi ont passé la soirée en musique –l’interprétation du célèbre Imagine de John Lennon au piano avec un casque de chantier ne manquait pas de charme – et la nuit a été calme et sereine. Comme pour oublier les violences de la veille, et pour ne pas laisser les campeurs de Gezi seuls face aux forces de l’ordre, il y avait encore beaucoup de monde mercredi soir et une vraie atmosphère de carnaval, sous la surveillance des policiers anti-émeute stationnés.

Les manifestants avaient établi un cordon de sécurité à distance respectable de leur position pour éviter tout incident, toute provocation qui aurait pu mettre le feu aux poudres. Car jusqu’au petit matin, tout le monde était persuadé que l’assaut final allait être donné, comme l'annonçaient les réseaux sociaux selon lesquels le Premier ministre avait donné l’ordre de l'assaut à son ministre de l’Intérieur. Chacun portait donc casque et masque à gaz, et à la main les remèdes aux gaz lacrymogènes. Mais ce qui était annoncé ne se produisit pas, et les campeurs de Gezi ont pu dormir sur leurs deux oreilles.

Pas confiance

En début de soirée, la rencontre entre des représentants des opposants au projet d'aménagement du parc et le Premier ministre Tayyip Erdogan s'est terminée sur un message d'apaisement. Le chef du gouvernement a évoqué la possibilité de soumettre ce projet à un référendum populaire, une solution qui pourrait faire baisser la tension dans le pays.

Mais le peuple de Taksim se montrait très réservé hier sur les propositions de sortie de crise esquissées à Ankara, et ce pour plusieurs raisons. En premier lieu les contestataires ne se sentent pas représentés par les Onze qui ont rencontré le Premier ministre Erdogan. Ensuite, ils ne font pas confiance au chef du gouvernement qu’ils considèrent capable de changer d’avis après avoir obtenu ce qu’il veut, à savoir l’évacuation du centre d’Istanbul. Enfin ils ne sont pas sûrs qu’un référendum sur l’avenir du parc Gezi, si toute la population d’Istanbul - avec ses quartiers pauvres et conservateurs favorables à l’AKP au pouvoir –doit se prononcer, qu’un tel scrutin aille dans le sens qu’ils souhaitent.

Malgré tout, les nouvelles en provenance d’Ankara, saluées par la presse et les réseaux sociaux comme une victoire, ont participé à cette ambiance de fête. Même si beaucoup regrettent qu’autant de temps ait été perdu et de violence exercée pour en arriver là, à l’expression toute simple de la démocratie.

 

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