Il s'agit soit d'une très, très grande maladresse, soit d'une vaste tromperie économique
en disant ses mots le ministre de la Consommation Benoît Hamon a laissé clairement peu de place au doute, ce jeudi 14 février.
Des propos qualifiés ce vendredi 15 février de «léger» et «imprudent» par le président de la société Spanghero, Barthélémy Aguerre.
Il y aurait tromperie donc. La viande aurait quitté les abattoirs roumains étiquetés viande de cheval. Elle aurait ensuite été achetée par la société française Spanghero à un trader néerlandais - trader déjà condamné dans une affaire similaire. Selon l'enquête, Spanghero aurait ensuite réétiqueté la viande indiquant qu'il s'agissait de viande de boeuf, et l'aurait vendue à la société Comigel, dans l'est de la France, chargée, elle, de cuire et de conditionner les plats cuisinés.
Un profit d'environ 550 000 euros
Selon le ministre, Comigel ne pouvait pas ignorer qu'il ne s'agissait pas de viande de cheval, l'odeur et la couleur n'ayant absolumment rien à voir. On sait également que chaque lot de viande possédait un code douanier très clair : celui de la viande de cheval, pas de la viande de boeuf.
Cela faisait au moins six mois que le trafic durait. La justice devra maintenant déterminer les responsabilités. Pour l'instant en tout cas, l'agrément sanitaire de l'entreprise Spanghero est suspendu pour dix jours. La fraude - si elle est avérée - aurait permis à Spanghero de faire 550 mille euros de profit, le prix de la viande de cheval étant bien moindre que celui du boeuf.
Des ramifications jusqu'à Chypre
Un scandale alimentaire, des questions sur la santé publique et, en toile de fond, des montages financiers complexes, l'affaire de la fraude à la viande de cheval implique de nombreux pays. L'Allemagne est touchée à son tour, puisque des tests ont révélé la présence de cheval dans un lot de lasagnes de bœuf. Berlin, Londres et Paris sont concernés et des ramifications sont découvertes jusqu'à Chypre.
C’est à la fin de l’année dernière que la société chypriote Draap Trading achète 60 tonnes de viande de cheval à un abattoir situé en Roumanie. Ce « consignment » est livré aux grands entrepôts frigorifiques Nemijtek à Breda, dans le sud des Pays-Bas.
Comme d’autres courtiers en viande, le nommé Hans Windmeijer, 55 ans, occupe un petit bureau des emprises même de la société Nemijtek. C’est lui qui a fourni à différents clients en Europe de la viande censément de bœuf et dont tout porte à croire qu’elle aurait en réalité été prélevée sur les 60 tonnes de viande de cheval.
A l’examen du registre du commerce de Breda, on s’aperçoit qu’en 2009, Hans Windmeijer a racheté la société Draap Trading à un autre courtier Jan Fasen, 61 ans. Les deux hommes se connaissent bien car ils ont été condamnés par la justice néerlandaise l’année dernière, le second à de la prison ferme, le premier à des travaux d’intérêt général pour avoir falsifié des documents et transformé en bœuf halal, destiné à la France, du cheval latino-américain dont les bénéfices sont de 4 millions d’euros. Draap est en langue néerlandaise l’inversion du mot Paard, c’est-à-dire cheval. Les comparses ajoutaient donc du cynisme à l’escroquerie.