(Avec notre correspondant à Oslo, Grégory Tervel)
Un sourire pour masquer sa nervosité, puis un sourire de soulagement. Anders Behring Breivik a accueilli avec satisfaction la conclusion du verdict. Reconnu responsable de ses actes à l’unanimité des cinq juges, il est condamné à la peine la plus lourde possible : 21 ans de prison dont 10 ans incompressibles assortis d’une mesure de rétention de sûreté qui permettra de le garder en prison jusqu’à la fin de ses jours. Ses avocats ont annoncé qu'il ne fera pas appel de sa condamnation.
Concrètement son dossier repassera devant la justice tous les cinq ans, une fois qu’il aura purgé sa peine et il sera à chaque fois maintenu en détention s’il est toujours jugé dangereux pour la société.
Ce verdict va dans le sens de ce que souhaitait Breivik, mais aussi la société norvégienne et les victimes dans leur majorité. En revanche, il va à l’encontre des deux premiers experts psychiatres qui avaient diagnostiqué une schizophrénie paranoïde chez Anders Breivik et du parquet qui avait requis l’internement psychiatrique, tant le doute sur sa santé mentale était élevé.
« Vous êtes sauvés »
La bombe avait semé le chaos dans le centre de la capitale. A Utoya, le massacre a ensuite été une traque impitoyable, décrite et filmée. Il y a notamment toutes ces images tournées par un hélicoptère de la télévision suédoise, arrivé avant la police sur le site, car les policiers ont mis plus d’une heure pour rejoindre l’île en raison du mauvais temps.
Pendant ce temps, Anders Breivik poursuivait son massacre. Il tirait dans les jambes des jeunes qui s’enfuyaient en courant, puis les achevait d’une balle dans la tête. Il se faisait aussi passer pour un policier pour attirer ses victimes, en disant : « Je suis là, le tueur s’est rendu, vous êtes sauvés ». Certaines se sont jetées dans ses bras avant qu’il ne les abatte.
Aucune empathie
Anders Breivik n’a montré aucune empathie pour ses victimes. Il les a même constamment provoquées. Il n’a pleuré que deux fois, sur lui-même, en regardant sa photo déguisé en « commandeur » et une vidéo qu’il avait postée sur internet.
Pendant le procès, il est décrit comme un homme ordinaire : mauvais élève, entrepreneur calamiteux. Même sa carrière politique était un échec : il avait abandonné le parti d’extrême droite où il militait, parce que ce dernier n’était pas assez extrême à son goût.
Attaques minutieusement préparées
Il a passé neuf ans à fomenter son sinistre projet. Il s’est isolé, a acheté une ferme, créé une société pour acheter les engrais qui lui ont permis de fabriquer ses explosifs. D’où venait l’argent ? Avait-il des complices ?
L’enquête et le procès n’ont pas permis de répondre à ces questions. A chaque étape de son projet, il écrasait son disque dur pour ne laisser aucune trace. Ne reste que ce bréviaire de 1 500 pages qu’il a mis en ligne une heure avant le premier attentat.
Schizophrénie paranoïaque
Les experts psychiatres considèrent qu’Anders Breivik est atteint d’une forme de schizophrénie paranoïaque, mais qu’il est suffisamment responsable de ses actes pour être jugé. Deux expertises se sont néanmoins contredites sur la question du discernement, et les juges devront donc trancher.
Anders Breivik reconnaît les faits mais il plaide non coupable. Il affirme avoir agi pour protéger son pays contre le multiculturalisme qu’il considère comme une menace. Pour les trois quarts des Norvégiens, le tueur a trop minutieusement préparé ses crimes pour ne pas être considéré comme responsable de ses actes.
Lui-même ne veut pas être déclaré fou : il se considère comme un commandeur des templiers en mission pour sauver l’Europe et cela ruinerait sa posture.
Le tribunal d'Oslo l'a jugé pénalement responsable de ses actes. Il a condamné le Norvégien à 21 ans de prison, une peine qui peut être prolongée. Breivik ne devrait pas faire appel. Les portes de la prison se refermeront probablement indéfiniment sur lui car il est considéré comme trop dangereux pour être remis en liberté.