Le Royaume-Uni sous pression après la sanction de Moody’s

Après la très influente agence Standard and Poor's en janvier dernier, c’est au tour de l’agence de notation américaine Moody’s d’envisager de priver de leur triple A plusieurs pays européens dans les mois qui viennent. La France, l’Autriche et la Grande-Bretagne pourraient être sanctionnés. Jusque-là à l'abri d'une possible dégradation, les Britanniques se trouvent eux aussi dans le viseur.

L'agence de notation américaine a abaissé la perspective du triple A de la France de stable à négative, conséquence, selon elle, des incertitudes pesant sur « la conjoncture de la zone euro » et sur « les objectifs de Paris en matière de réduction de déficits ». La France n’est pas la seule à être sanctionnée. Deux autres pays, l’Autriche et la Grande-Bretagne, sont également placés sous perspective négative par l'agence de notation Moody's. Leur fameux triple A pourraient ainsi être dégradés dans les semaines à venir.

Moody’s a également sanctionné six autres pays, parmi lesquels l'Italie, l'Espagne, le Portugal, la Slovaquie, la Slovénie et Malte, susceptibles d’être affectés « par les risques financiers grandissant émanant de la crise dans la zone euro ». Moody’s a ainsi abaissé d’un cran les notes de solvabilité de l’Italie et du Portugal, et de deux crans celle de l’Espagne. Seul le Fonds européen de stabilité financière (FESF) a échappé à cette dégradation. Moody’s a, en effet, confirmé sa précieuse notation triple A au mécanisme de secours mis en place au plus fort de la crise grecque pour venir en aide aux pays les plus fragiles de la zone euro.

Des mesures d’austérité draconiennes

La très influente agence américaine Standard and Poor's avait déjà dégradé la note de la France et de l'Autriche en janvier dernier. En revanche, c'est la première fois que la Grande-Bretagne se voit directement attaquée. Moody’s est ainsi la première agence à menacer la pérennité du sacro-saint triple A britannique. Le ministre britannique des Finances, George Osborne, a immédiatement réagi à cette décision évoquant un « rappel à la réalité ». « C’est la preuve que la Grande-Bretagne ne peut pas renoncer à traiter la question de sa dette. Cet avertissement justifie les mesures de rigueur adoptées par le gouvernement », a déclaré le chancelier de l’Echiquier.

Pour lutter contre un déficit public parmi les plus élevés en Europe et contenir une dette publique qui a dépassé le seuil symbolique des 1 200 milliards d’euros (1 000 milliards de livres), le gouvernement britannique a mis en place des mesures d’austérité draconiennes comme notamment le recul de l’âge de départ à la retraite dans le secteur public à 66 ans dès 2020 et le gel des salaires du secteur public jusqu’à fin 2012.

Cette politique de réduction des dépenses publiques qui avait, jusqu’à présent, satisfait les agences de notation. D’autant que le Royaume-Uni, qui ne fait pas partie de la zone euro, a toujours conservé le contrôle de sa politique monétaire. Londres se retrouve donc dans la même situation que ces pays de la zone euro, dont elle tente pourtant par tous les moyens de se démarquer. Pour Pauline Schnapper, professeur à l’univeristé Paris III, spécialiste du Royaume-Uni, Moody’s a menacé Londres car « aujourd’hui les perspectives de croissance dans le pays ont changé. On est au bord d’une deuxième récession, il y a une véritable inquiétude sur la capacité du gouvernement à réduire la dette publique d’ici 2015 ».

Une banque centrale autonome

Et les derniers chiffres confirment la tendance selon laquelle la situation ne devrait pas s'améliorer dans les prochains mois. L’économie britannique s'est contractée de 0,2% au dernier trimestre 2011, une performance pire que celle prévue par les experts. Une croissance insuffisante donc pour en enrayer la flambée du chômage qui a atteint près de 8,5% de la population active, selon les derniers chiffres de l'Office des statistiques nationales (ONS). Le nombre des sans-emploi a atteint son plus haut niveau depuis 17 ans.

La Grande-Bretagne continue toutefois de disposer d’un atout majeur dont ses homologues de la zone euro sont privés : une banque centrale autonome. Comme l’a déjà fait plusieurs fois dans le passé, la Banque d’Angleterre peut effectuer rapidement de nouvelles injections de liquidités dans l’économie pour soutenir l’activité. Une politique qui, jusque là, a aidé le Royaume-Uni à emprunter dans de très bonnes conditions sur les marchés pour financer sa dette.

 

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