Manifestations et contestation lors de l'anniversaire de l'indépendance de l'Ukraine

L’Ukraine a célébré, ce mercredi 24 août 2011, le 20e anniversaire de son indépendance, elle sortait alors du giron de l’URSS. L’occasion pour plus de 5 000 Ukrainiens de manifester à Kiev contre le régime en place et pour soutenir l'opposante et ex-Premier ministre Ioulia Timochenko, incarcérée dans le cadre d'un procès pour abus de pouvoir.

Jour de célébration à Kiev, les drapeaux claquent au vent, la population est descendue dans les rues pour fêter le 20e anniversaire de l’État ukrainien. Le 24 août 1991, le Parlement de la République socialiste soviétique d'Ukraine votait l'indépendance, une décision plébiscitée quatre mois plus tard lors d'un référendum par plus de 90% de la population.

Deux décennies plus tard, l’enthousiasme est bien retombé. Selon un sondage mené par l'Académie des Sciences d'Ukraine, 47% des personnes interrogées regrettent aujourd'hui la chute de l'Union soviétique. La crise économique, la corruption généralisée et l'incurie des dirigeants politiques ukrainiens ont eu raison de l'euphorie des premiers temps. D'après une autre enquête, 80% des sondés soulignent que leurs conditions de vie se sont dégradées depuis 1991.

Journée de contestation

Alors, pour certains, cette journée de célébration est l'occasion de se faire entendre. Dans le parc Chevchenko, au centre de la capitale ukrainienne, 5 000 personnes se sont rassemblées à l'appel du Comité de résistance à la dictature, une plateforme qui rassemble tous les principaux partis d'opposition. Des cris, des chants, les manifestants entendent ici dénoncer la dérive autoritaire du gouvernement du président Viktor Ianoukovitch.

Ils réclament la libération de l'ancien Premier ministre, Ioulia Timochenko, accusée d'abus de pouvoir dans le cadre de la signature de contrats gaziers avec la Russie en 2009 et emprisonnée depuis le 5 août. « Ioulia Timchenko n'est pas une sainte, mais ce procès n'est pas juste », explique une femme d'une quarantaine d'années. Depuis l'élection de Viktor Ianoukovitch à la tête de l'Etat ukrainien, les attaques contre l'opposition se sont multipliées, mais sans pour autant déclencher de mobilisations massives au sein de la population.

« Les citoyens ukrainiens ont perdu confiance dans leurs hommes politiques, et ce quels que soient les partis, souligne Aliona Getmanchuk, directrice de l'Institute of Word Policy. Les jeunes cherchent surtout à gagner de l'argent et à quitter le pays ». Plus d'un quart de la population ukrainienne vit sous le seuil de la pauvreté et les 100 personnes les plus riches du pays possèdent des actifs d'une valeur estimée à 61% du PIB. « Le 20e anniversaire de l'indépendance coïncide pourtant avec un moment charnière de notre histoire. J'espère que d'ici la fin de l'année, nous allons finaliser les négociations pour signer un accord d'association avec l'Union européenne, continue Aliona Getmanchuk. Et je ne pense pas que les réserves de Bruxelles sur le déroulement du procès Timochenko auront une influence sur ce processus ».

Le président Ianoukovitch vise l'Europe

Longtemps taxé de pro-russe, le président Ianoukovitch tente, en effet, depuis son élection, de se rapprocher de l'Union européenne, une politique que la Russie observe d'un œil mauvais. Il y a quelques jours, lors d'une rencontre à Sotchi entre les présidents Ianoukovitch et Medvedev, Moscou a refusé de baisser le prix du gaz exporté vers l'Ukraine si Kiev n'accepte pas de rentrer dans l'Union douanière formée par la Russie, le Belarus et le Kazakhstan. « Viktor Ianoukovitch est pragmatique, il sait que les oligarques qui le soutiennent ont peur de la concurrence russe, il préfère donc faire les yeux doux aux Européens », conclut Aliona Getmanchuk.

Ecartelée entre l'Europe occidentale et la Russie et divisée par de profondes fractures linguistiques et politiques, l'Ukraine a cependant réussi durant deux décennies à maintenir sans violence son intégrité territoriale, contrairement aux pays des Balkans et du Caucase. Vingt ans après l'indépendance, l'immense majorité des citoyens ukrainiens, qu'ils parlent ukrainien ou russe, ont conscience d'appartenir au même pays. Une réalité qui était loin d'être évidente en 1991 et qui constitue déjà une belle réussite.

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