Un an après le discours de Grenoble, la condition des Roms en France de plus en plus précaire

Il y a un an, le 30 juillet 2010, Nicolas Sarkozy prononçait un discours à Grenoble, dans lequel il demandait le démantèlement de campements illicites des Roms et annonçait une lutte renforcée contre l'immigration irrégulière. Depuis cette date, les conditions de vie des Roms se sont dégradées en France.

Depuis le discours du chef de l'État français, à Grenoble, trois quarts des 741 campements illicites référencés il y a un an, ont été démantelés, selon Pierre-Henry Brandet, porte-parole du ministère de l’Intérieur : « En ce qui concerne les ressortissants roumains et bulgares qui ont été reconduits dans leur pays d’origine, ils sont au nombre de 9 530 pour l’année 2010, dont 7 000 (près de 80%) ont bénéficié de l’aide au retour qui est de 300 euros par adulte et 200 euros par enfant. »

En l’absence de statistiques officielles sur le nombre de Roms en France, les associations qui les défendent, avancent le chiffre de 15 000 personnes, un chiffre stable depuis plusieurs années. Cette constatation induit que ceux qui ont été expulsés, sont revenus en France.

Les Roms, boucs émissaires de l'insécurité

En raison de la politique répressive française, les Roms vivent de plus en plus dispersés et cachés, souligne Alexandre Le Clève de l’association de défense des étrangers La Cimade : « Ils essaient de se mettre à l’écart et reculent des zones accessibles aux associations. Par conséquent, sur le plan social, sur le plan du suivi sanitaire et de la scolarisation, nous rencontrons des situations de gens qui sont complètement marginalisés. La situation des Roms a clairement empiré depuis un an. »

Pour Laurent El Ghozi du collectif d’associations Romeurope, cette politique n’a qu’un seul objectif : celui de désigner « le coupable » d'un manque de sécurité en France : « Le but est d’afficher une politique xénophobe, de créer une population de boucs émissaires, en l’occurrence les Roms, et de les désigner à la vindicte populaire pour focaliser toutes les haines, toutes les angoisses, toutes les difficultés et par la suite, justifier des lois comme la Loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, connue sous son acronyme "Loppsi 2", qui concerne tous les citoyens françaisObjectif atteint, poursuit Laurent El Ghozi, car la loi Loppsi 2 a bien été votée. Une partie des électeurs est rassurée, car ils apprennent à travers les statistiques d’expulsion que ces boucs émissaires sont reconduits à la frontière. »

La presse étrangère et la Commission européenne se sont insurgées contre cette politique discriminatoire. En France, le Conseil d'État a même annulé une circulaire anti-Roms en avril 2011, parce qu’elle désignait leur origine ethnique, ce qui est anticonstitutionnel. Depuis, les poursuites des Roms se font plus discrètement, mais cela n’empêche pas qu’ils vivent dans une précarité toujours plus grande.

Pour sortir de l'impasse : lever les mesures transitoires

Pour les associations, la solution serait simple : il faudrait accorder aux Roms le droit de travailler. Aujourd'hui, les Roms, en tant que ressortissants de la Roumanie et de la Bulgarie, sont soumis à des mesures transitoires en raison de leur entrée relativement récente -depuis moins de 7 ans- dans l'Union européenne (UE). La disposition n'est pas contraignante pour les États membres. Chaque pays -et donc la France- est libre de lever ces mesures à tout moment.  La première revendication du collectif Romeurope est donc la levée des mesures.

Cette levée n’entraînerait pas une menace pour le marché de travail en France, assure Damien Nantes, directeur de l'association Hors la Rue : « On ne parle que de 15 000 personnes, dont environ 7 000 adultes qui souhaitent juste travailler pour disparaître ensuite de l’attention qu’ils suscitent aujourd’hui. Quand on travaille, on peut accéder à un logement. On met les enfants à l’école. Et on disparaît en quelque sorte ».

Toutes les associations s'accordent à dire que les Roms s'intègrent facilement une fois qu'ils ont accès au travail. Des exemples l'ont montré dans le passé. Une chose est sûre : il y a une date limite pour ses mesures transitoires et c'est le 31 décembre 2013.

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À consulter :

L'Union européenne et les Roms (site de l'UE)
Texte du discours du président Nicolas Sarkozy du 30 juillet 2011.
 

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