Après des mois de résistance, le Portugal se résigne. Il en appelle à Bruxelles pour éviter la faillite. Le Premier ministre portugais José Socrates démissionnaire devrait annoncer dans les prochaines heures sa demande officielle d’aide financière à la Commission européenne. Il a expliqué que « sur fond d’instabilité politique, le pays ne pouvait plus se refinancer ». La pression est venue des banques privées portugaises qui ne peuvent plus acheter de dettes, ce qui met en péril leur propre refinancement et augmente leurs besoins de fonds propres. Le Portugal a réussi à placer un milliard d'euros sur les marchés, mais à un prix beaucoup trop élevé pour un Etat déjà surendetté et le pays doit rembourser quelque 9 milliards d'euros de dette avant la mi-juin. Une somme conséquente d’autant que les agences de notation financières ont dégradé la note du pays.
Cette aide extérieure devra être discutée, vendredi 8 et samedi 9 avril, à Godollo, dans la banlieue de Budapest, à l'occasion d'une réunion informelle des ministres européens des Finances. Le pays pourrait bénéficier d’une aide de près de 75 milliards d’euros, selon le montant évoqué fin mars par le président de l’Eurogroupe, Jean-Claude Junker. Selon les médias portugais, cette enveloppe pourrait s’élever à 90 milliards, soit plus de la moitié du PIB du pays.
Des contreparties budgétaires
Cette aide qui devrait couvrir les besoins en financement du pays jusqu’en 2013 devrait prendre la même forme que celle de l’Irlande si l’on en croit l’analyste Thibaut Mercier, spécialiste du Portugal chez BNP Paribas : « Ce sera le même modèle qui celui qui a été octroyé à l’Irlande. Un mélange de prêts qui proviennent à la fois du Fonds de secours européen (FESF), probablement de la Commission européenne à travers son budget et une partie qui vient du FMI ».
Lors de ce Conseil européen, les ministres des Finances aborderont également la question des contreparties qui seront exigées, en termes de réduction des dépenses budgétaires et de plan d’austérité. Un point plutôt délicat, puisque le gouvernement de José Socrates n'est censé que s'occuper des affaires courantes, en attendant les élections anticipées du 5 juin prochain.
Après le Portugal, l’Espagne ?
Après la Grèce et l'Irlande, le Portugal devient donc le troisième pays de la zone euro, à faire appel à une aide extérieure. Mais qui sera le prochain sur la liste ? Tous les regards se tournent vers l’Espagne. Pour sa part, la ministre de l’Economie espagnole a exclu, jeudi 7 avril 2001, tout « risque de contagion ». « Depuis un an, nous avons accru l’ajustement de nos comptes publics », a expliqué Elena Salgado. Même constat pour le secrétaire général de l’OCDE, Angel Gurria qui a jugé, jeudi, « complètement erroné de comparer les situations budgétaires des deux pays ». Reste que le secteur bancaire espagnol est très lié à celui du Portugal et que le taux de chômage en Espagne de plus de 20% est le plus élevé parmi les pays de l’Union européenne.
Mais pour Eric Delannoy, analyste au cabinet Weave, une part de la crise que traversent les pays de la zone euro a été induite par les marchés : « les marchés ont intérêt à provoquer des crises car cela génère des mouvements spéculatifs. Quand on déclare qu’un pays va être en faillite, le coût de l’assurance pour se prémunir contre un risque de défaillance augmente. Il y a alors un mouvement spéculatif sur des instruments financiers. Le marché à tout intérêt à amplifier des mouvements qui sont réels ».