En Europe, les liens entre politique et religion restent étroits

En France, l'UMP, le parti présidentiel organise ce mardi 5 avril un débat sur la laïcité. Débat jugé par certains inutile, voire stigmatisant pour l'islam. Reste que le questionnement sur la place de la religion dans l’espace public se pose, de manière différente selon les  pays européens.

Par Franck Weil-Rabaud (avec la collaboration de Tudor Tépénéag et de Cécile Debarge)

La France est en Europe un exemple unique où la séparation entre l’Eglise et l’Etat est établie par une loi datant de 1905. Mais, un peu plus d’un siècle plus tard, la présence de citoyens de confession musulmane dans les sociétés européennes a modifié les termes du débat.

Pour Raphaël Liogier, sociologue et professeur à l'Institut d’études politiques d'Aix-en-Provence, « les sociétés européennes vivent une crise d’identité. Les Européens cherchent à retrouver des racines, à savoir ce qu’ils sont. Comment ils n’arrivent pas à se mettre d’accord, ils se définissent par rapport à ce qu’ils ne sont pas et c’est là qu’intervient l’islam. L’islam est devenu le négatif de l’identité européenne ».

Dans certains pays, la problématique a même pris une tournure plus violente. C'est le cas au Danemark où un parti d'extrême droite, soutien de la coalition gouvernementale, s'en prend directement aux musulmans comme en témoigne Hamid El Musti, conseiller municipal à Copenhague et originaire du Maroc:

La place de l’islam est également au centre du débat politique en Allemagne. Et comme en France, c'est l'intégration des musulmans qui est mise en question par le parti au pouvoir de centre droit. Explications de Stefen Seidendorf de l'Institut franco-allemand de Ludwigsburg:

Dans les pays à forte tradition catholique, même si l'Etat est laïc, les rapports entre politique et religion restent étroits. C'est le cas en Italie. « Des hommes politiques de premier plan parlent de l’Italie comme d’un pays catholique » note Marco Bontempi, sociologue à l'université de Florence. « Cela s’explique par l’influence politique de l’Eglise. Cette influence, les autres religions ne l’ont pas. Et cela représente forcément un obstacle pour ces autres religions pour participer à la vie publique ».

En Espagne, autre pays de tradition catholique, les autorités gouvernementales, depuis l’accession au pouvoir de José Luis Zapatero et des socialistes, ont au contraire tout fait pour se défaire de l'influence de l'Eglise. Pour le journaliste Inigo Picabia, « on peut même parler de guerre lorsque le gouvernement a fait voter des lois en faveur du mariage homosexuel ou de l’avortement. On a vu des évêques descendre dans la rue et participer à des manifestations contre le gouvernement ».

La laïcité offre donc en Europe un visage aussi multiple que les pays qui la composent. Mais la crise identitaire semble, elle, très largement partagée avec le risque non négligeable de voir certains citoyens être stigmatisés en raison de leur croyance religieuse.

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