Environ 3,1 millions d'électeurs sont appelés à renouveler la totalité de leurs institutions centrales et régionales pour un mandat de quatre ans. Il s’agit, dans ce pays aux institutions pléthoriques, de la présidence tripartite, du Parlement central et des assemblées des deux entités du pays, la Republika Srpska (serbe) et la Fédération croato-musulmane. Difficile de s’y retrouver parmi les 8 149 candidats qui se présentent au scrutin.
Malgré les efforts de la communauté internationale, toujours présente en Bosnie-Herzégovine depuis les accords de paix de Dayton en 1995, la réconciliation peine à se faire entre les différentes communautés. Depuis les précédentes élections, en 2006, les réformes voulues par l’Union européenne sont au point mort. Jusqu’à présent, seuls les forces militaires, les services de douanes et le système fiscal sont unifiés. Signe du peu d’enthousiasme que soulève l’unité du pays, l’hymne national n’a toujours pas de texte, faute de compromis entre Serbes, Musulmans et Croates.
Les électeurs sont favorables à l’Europe
Selon Valentin Inzko, le Haut représentant de la communauté internationale en Bosnie, ce pays des Balkans se trouve aujourd’hui « à la croisée des chemins ». Selon lui, les hommes politiques doivent décider « s’ils veulent ou non respecter le souhait de plus de 80% des électeurs », à savoir le rapprochement avec l’Europe.
Pourtant, pendant la campagne électorale, la rhétorique nationaliste a dominé les débats. L’homme fort de l’entité serbe, le Premier ministre Milorad Dodik, n’hésite pas à brandir la menace de l’éclatement de la Bosnie-Herzégovine en deux pays : « Le mieux pour la Bosnie, a-t-il estimé un jour, est qu’on se sépare à l’amiable ». Pour l’heure, Milorad Dodik a les meilleures chances d’être élu à la présidence de la Republika Srpska.
« Faisons des efforts pour vivre mieux »
Les Musulmans sont à peine plus optimistes quant à l’unité du pays. Haris Silajdzic, l’actuel président collégial de Bosnie, fustige lui aussi l’éventualité d’une sécession avec ses voisins de la Republika Srpska en accusant les Serbes d’ « empêcher les progrès » du pays vers l’Europe. Rare sont les voix plus conciliatrices, comme celle de son concurrent Bakir Izetbegovic. « Si on ne peut pas s’aimer, faisons des efforts pour vivre mieux », prône ce fils de l’une des figures emblématiques de la communauté musulmane pendant la guerre, Alija Izetbegovic.
Mais les accords de Dayton ont coupé le pays en deux, et la Fédération croato-musulmane (51% du territoire) n’a aucune influence sur les décisions prises de l’autre côté de l’invisible frontière, dans la Republika Srpska (49% du territoire). Les institutions centrales où les hommes politiques doivent coopérer restent très faibles et surtout mal-aimées. Le vrai pouvoir revient aux entités communautaires qui profitent d’une large autonomie.
« La Bosnie est un patient qui souffre d’une maladie grave et qui a besoin de soins prolongés », estime l’analyste Srecko Latal du l’International Crisis Group (ICG). Seulement, après quinze ans d’efforts diplomatiques, la communauté internationale risque de perdre l’espoir de pouvoir réconcilier les anciens belligérants. De nombreuses voix considèrent que ce scrutin, le sixième depuis la fin de la guerre, pourrait être celui de la dernière chance.