Roms : l’Union européenne offre un sursis à la France

Une procédure d’infraction pour non respect de la législation européenne. Voilà ce que va lancer à la mi-octobre la Commission européenne si la France ne donne pas d’ici là de garanties fermes sur les conditions d'expulsions de Roms.

Frappera ? Frappera pas ? Finalement, la Commission a choisi de menacer la France d’une procédure d’infraction qui pourrait théoriquement l’emmener devant la Cour européenne de Justice. Toutefois, elle lui laisse une porte de sortie assez confortable. Certes, « la Commission considère que la France n'a pas transposé la directive sur la libre circulation en droit national de manière à rendre ces droits complètement efficaces et transparents », mais Bruxelles est prête à attendre jusqu’au 15 octobre prochain pour que Paris lui envoie « un projet de mesure de transposition ainsi qu'un calendrier précis pour son adoption ».

Passé ce délai, la Commission enverra une lettre de mise en demeure, ce qui constituerait la première étape d’une procédure d’infraction. Mais personne ne s’attend à ce que l’affaire atteigne ce stade. En effet, il semblerait que la France ait déjà préparé le projet en question. D’ailleurs, le président Sarkozy lui-même avait assuré récemment que les éventuelles lacunes en la matière dans la législation nationale seraient « naturellement corrigées ».

Probabilité zéro

Et même si, à la surprise générale, la France n’arrivait pas à respecter le délai accordé, la probabilité de la voir traînée devant la Cour de justice paraît pratiquement égale à zéro. Si la lettre de mise en demeure de la part de la Commission européenne arrivait un jour à Paris, la France aurait encore deux mois pour se conformer au droit européen. Si elle s’obstinait toujours à ne pas remplir les conditions exigées, une deuxième étape de la procédure d’infraction pourrait être déclenchée. Celle-ci consiste en l'envoi d’un « avis motivé »à l’Etat contrevenant. Ce n’est qu’en absence d’une réaction appropriée de celui-ci que Bruxelles peut saisir la Cour européenne de justice qui a le pouvoir de prononcer éventuellement des sanctions financières contre l’Etat en infraction.

La procédure est donc longue et compliquée. Ainsi, il n’est pas étonnant que d’habitude toutes les parties intéressées préfèrent l’éviter. En conséquence, 90% des litiges trouvent une solution avant d’atteindre le stade de la saisine de la Cour.

Prestige sauvé

En fin de compte, non seulement la France évite d’être poursuivie pour la non-transposition de la directive sur la libre circulation – ce qui serait quand même fâcheux au moins sur le plan de son prestige et de sa fierté – mais elle échappe aussi au lancement d’une accusation beaucoup plus grave : celle de « discrimination » à l’encontre des Roms. Dans le domaine, la Commission prend note « des assurances apportées par la France au plus haut niveau politique ». Toutefois, elle semble se méfier toujours un peu, car elle annonce en même temps l’envoi immédiat d’« une lettre aux autorités françaises avec des questions détaillées concernant l'application dans la pratique des assurances politiques qu'elles ont données ». Affaire à suivre, donc.

Les autres aussi

Ce qui doit apporter une petite satisfaction supplémentaire aux autorités françaises, c’est qu’elles ont également obtenu que la Commission analyse « la situation dans tous les autres Etats membres en ce qui concerne la transposition de la directive sur la libre circulation ». Si des imperfections en la matière étaient constatées, des procédures d’infraction pourraient être lancées également à l’encontre d’autres Etats. Ce qui aurait évité à la France de rester la seule à être montrée du doigt.

Bien sûr, politiquement parlant, le but du jeu pour la Commission européenne n’est pas de punir ou d’humilier tel ou tel Etat membre, mais de garantir que tous les Etats de l’Union respectent scrupuleusement la loi européenne. En tant que gardienne des traités, elle ne cesse pas de répéter qu’elle est dans son rôle quand elle y veille. 

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